N’ayons pas peur de certains paradoxes ou de certaines associations étonnantes…
L’avantage des vacances, c’est que Genève se vide. On peut y circuler, on peut s’y garer et on peut aller voir les blockbuster au cinéma le jour de leur sortie et être dans une salle à peine remplie. Ce qui explique :
The dark knight rises de Christopher Nolan avec Christian Bale, Mario Cotilliard, Gary Oldman, Morgan Freeman, Anne Hattaway, Tom Hardy et Michael Caine
Et donc, pour faire contraste :
Volem rien foutre al païs, reportage de Pierre Carles
The dark knight rises de Christopher Nolan avec Christian Bale, Mario Cotillard, Gary Oldman, Morgan Freeman, Anne Hataway, Tom Hardy et Michael Caine
Voilà 8 ans que Gotham City est en paix. Batman s’est sacrifié pour faire de Harvey Dent un héros. Gotham y a cru et grâce à une loi très restrictive, la pègre est sous les verrous. Tout va bien… mais Bruce Wayne s’ennuie, il dépérit dans son manoir, ne s’occupe plus de ses affaires, ne sort plus. En perdant un moyen d’évacuer sa rage, il a perdu toute raison de vivre. Et voilà qu’un jour, une monte-en-l’air de talent vient dans son coffre fort lui voler des perles. En même temps, un terroriste appelé Bane s’installe à Gotham avec la ferme intention de plonger la ville dans le chaos.
On a tout dit et le reste sur le dernier Batman. Christopher Nolan a été porté aux nues, le film a reçu une avalanche de critiques dithyrambiques. Et à sa sortie, finalement, quelques articles, Libération en tête, ont commencé à faire la moue… mais c’était à se demander si c’était parce qu’ils n’avaient pas aimé ou parce qu’ils ne voulaient pas hurler avec les loups. Cela devient difficile de faire son commentaire à soi, tellement je me sens envahie par tous les commentaires…
The Dark Night rises n’est pas le film le plus génial de l’univers. Et peut être pas le meilleur Batman… Je suis encore en débat avec moi-même, mais il n’est pas impossible que je préfère le 2.
Ce qui est incontestable, c’est que c’est un film puissant avec des événements graves qui retournent Gotham en profondeur (oué, c’est une sorte de jeu de mots qui spoile). C’est aussi un film un peu long, sur ses 2h 45, il y a bien quelques passages à contracter. Dernier regret : on voit assez peu Batman, en pleine possession de sa Batmanitude. On voit plutôt Bruce Wayne franchement roulé dans la boue quasiment tout le long et pour des raisons variées. Pas beaucoup d’homme chauve-souris triomphant dans le film.
D’un autre côté, on a un scénario efficace et cohérent, qui reprend les 2 opus précédents pour clore l’histoire. Les 2h45 permettent aussi aux personnages secondaires récurrents d’être un peu plus visibles, comme Alfred par exemple ou encore le commissaire Gordon. Catwoman est très réussie.
La meilleure interprétation, c’est probablement Christian Bale qui, en revanche, est meilleur que dans ses films précédents, donnant une vraie profondeur au héros, dans lignée de l’histoire déjà écrite (même si le passé : « Ninja sectaire », ça ne m’a jamais trop convaincu, dans Batman).
Bref, oui, c’est un bon film. De là à philosopher sur les inspirations nihilistes de Nolan, faut peut être pas s’emballer, mais il est vrai que Nolan s’est dépasser le côté « gadget » du Superhéros pour en faire de vrais personnages. Et, joie, bonheur, il le fait en 2D.
Volem rien foutre al païs, reportage de Pierre Carles
Se retirer du jeu économique, refuser la consommation, ne pas travailler, inventer des modes de vie autonomes et solidaires. Ce sont des expériences de ce genre qui sont présentées dans ce reportage.
L’inconvénient, c’est peut être l’hétérogénéité de ces expériences, qui ne me semblent pas toutes relever du courant de penser qu’on appelle la décroissance. Par exemple, le Mouvement Okupa qui occupe des logements vides dans Barcelone pour des mal logés, est-il vraiment à sa place dans ce reportage ? De même que ce chômeur, dans un job center au Royaume Uni qui revendique de ne pas vouloir travailler, a-t-il vraiment une réflexion qui le porte ? Ou est-ce qu’il veut juste glander avec un RMI ?
Plus curieux, ce groupe Barcelonais : Dinerio gratis, qui promeut le vol dans les grandes surfaces, pour contraindre au partage, pour mener à sa perte la société de consommation. Mot d’ordre : argent gratuit, pas de travail. Si personne ne paie, si on ne travaille plus, on mettra par terre le système capitaliste et on fera la révolution…
Abolir le travail, comprendre par là un travail productif, c’est l’essentiel fil rouge de ce reportage. Ce qui ne veut pas dire : ne rien faire. Certains proposent un Revenu minimum pour tous, sans condition d’insertion. Et ensuite, chacun et chacune choisit ce qu’il/elle veut faire de sa vie, une fois que le minimum est assuré. Comme ce chômeur anglais. Ne pas avoir de travail rémunéré, est-ce forcément honteux ?
D’autres vivent encore plus nettement en dehors du système, pas de RMI, pas de cotisations retraites, dans une communauté quasiment autonome. L’eau est captée de la rivière, les bâtiments sont construits à base de paille et de bois. Toute la nourriture est produite sur place. S’ils vendent un peu leur production, c’est pour acheter ce qu’ils ne peuvent fabriquer : l’essence, les cigarettes, l’alcool, incidemment des produits fortement taxés… donc s’ils sont payés à partir d’un RMI, c’est la moitié de ce RMI au moins qui repart à l’Etat…
Et surtout, dans cette communauté, on parle du monde qu’on a envie de faire. Des alternatives qu’on est en train d’inventer.
Cette communauté est une expérience très intéressante, parce qu’on n’y prétend pas que tout le monde s’aime. Ce n’est pas une secte non plus. Et elle fonctionne depuis 7 ans.
On y parle du vol dans les magasins qui peut être une solution individuelle de dépannage, mais certainement pas une stratégie de lutte, parce qu’elle est illusoire et vaguement hypocrite. On y parle de comment se rentre compte qu’en produisant soit même son électricité, qu’en retraitant soi-même ses déchets, on arrêtait de combattre un système, on le rendait obsolète, inutiles. Peu importe ce que pense le MEDEF ou la Lyonnaise des eaux… nous n’avons pas réellement besoin d’eux.
Mais ce documentaire reste spectateur de ce qu’il filme et donc reste en surface. Une fois, on aborde avec un homme d’une cinquantaine d’année la question de la retraite ou de la maladie. Bien sûr, il reconnait que pour la retraite, il fait le pari de la solidarité dans la communauté. Quant à la maladie, leur autosuffisance ne va pas jusque là… pas de chirurgien, pas de cancérologue…
Et pour finir, les grands absents de ces documentaires, ce sont les enfants : en apparence, c’est une communauté d’adultes de tous âges. S’il y a des enfants, on ne les a pas filmé. Dans leur logique d’autonomie, comment prennent-ils en compte la protection des plus faibles, des plus jeunes, des plus vieux, des malades ? l’éducation ? la diffusion de la culture ? Car toutes ces personnes interviewés, on voit qu’elles ont fait des études, qu’elles ont les outils pour penser. Cette autonomie qui parfois ressemble à de l’isolement, leur fournira-t-elle toujours les outils pour penser ? et à leurs enfants ? Qui va les éduquer ?
Bref, un principal reproche qui a été fait à ce reportage par les associations qui réfléchissent sur la décroissance, était qu’il ne montrait que des solutions en marge de la société, désobéissance civile, autonomie réelle au quotidien mais finalement illusoire si vraiment ça va mal… Alors que la pensée de la décroissance formule des solutions pour modifier les rapports sociaux et les rapports de production dans une société comme la nôtre aussi.
Dans le fond, poser la question : le travail productif est-il la seule manière de faire fonctionner une société? le travail productif n’est-il pas par définition aliénant… c’est pas du tout inintéressant.