Puisque nous continuons à faire des ronds d’1 km sous surveillance, nous nous occupons. C’est trop tôt pour la confiture de sureau… je ne trouve toujours pas de Rhubarbe et la confiture de muguet est fortement déconseillée, rapport qu’on en meurt.
Alors, que faire ?
On commence par un sujet léger : du Shampoing maison !
Et on poursuit avec une critique plutôt sévère de Dérapages : série écrite par Pierre Lemaître d’après son roman « Cadres noirs » et réalisée par Ziad Doueiri avec Éric Cantona
Shampoing maison
Je vous ai déjà parlé de ma soeur qui suivait les cours de Mme Pomefresh et grâce à qui j’ai fait de la confiture de Lilas ? (D’ailleurs à ce sujet, une fois bien froide, c’est une tuerie. Tiède, bizarrement ça a moins de goût).
Ma soeur a offert à Leirnette un kit de sorcière pour faire ses propres cosmétiques pour cheveux. Jusque là, elle n’avait pas osé se lancer.
Mais ce jour-là, je n’avais pas du tout envie de travailler. On s’est lancé !
Honnêtement, c’est facile à faire, là, vous avez probablement le geste le plus technique de toute la préparation : mélanger 2 poudres dont une fait un peu des blocs qu’il faut écraser. Ou verser l’huile de ricin dans l’huile de coco réchauffée au bain-marie. C’est limite trop simple d’ailleurs pour qu’on puisse ensuite frimer avec, genre, moi, j’ai fait mon shampoing.
Avec le kit, on peut faire 2 doses de shampoing, 2 doses de démêlants et quelques doses de masque au coco.
Dérapages par Ziad Doueiri avec Éric Cantona
Une série en 6 épisodes qui m’a été solidement vendue : Dénonciation du capitalisme sauvage, procès contre le système et le management déshumanisé… C’est donc ce que j’ai pensé que j’allais voir… et j’ai vu autre chose. Alors, contrairement à la plupart de mes amis de gauche qui m’en ont fait de la pub, je ne vais pas dire (beaucoup) de bien.
En préambule, je reconnais que je l’ai regardé jusqu’au bout (même si plus distraitement sur les épisodes 4 et 5) et que j’ai globalement passé un bon moment. Oui, Éric Cantona est formidable et tient la série tout seul. Et en fait, c’est un peu là, le problème.
C’est l’histoire d’Alain Delambre, un ancien cadre de 57 ans, anéantis par un chômage qui dure depuis 6 ans, enchaînant les boulots minables. Il est prêt à tout pour avoir un boulot même à accepter des procédures de recrutements limites. Lorsque son dernier espoir s’effondre, il décide de se révolter contre le système qui l’a trahi : il prend en otage 10 cadres sup d’une entreprise qui s’apprête à conduire des licenciements massifs.
Toute cette histoire va tourner autour d’Alain Delambre, qui enchaine les humiliations professionnelles et (éventuellement personnel sous la forme de son abruti de gendre libéral). Tout cela est tout de même un peu caricatural, les personnages (que ce soit les chômeurs ou les patrons) réduits à leur fonction, les discours sociaux qui paraissent trop écrits pour être dits au détour d’une conversation. Mais tant pis. La série parfaite est rare et j’ai passé un bon moment en regardant The Witcher, je ne vais pas faire ma difficile.
Mais justement, a priori, Dérapages a plus d’ambition que The Witcher. On en attend plus.
Ce qui m’a tout de suite heurté, c’est le profil de ce personnage principal. On nous explique qu’il a du mal à payer les traites de son appart dans lequel il a mis tous ses espoirs, qu’il gagne un salaire minable dans des conditions pourries… Ce qui le fait tenir, c’est sa femme qu’il idolâtre, qui est toute sa vie. Eh bien, oui, parlons-en de sa femme. Il l’aime en tant que personne à part entière, ou comme il aime son appart dans lequel il a mis tous ses espoirs ?
On découvre, presque par hasard qu’elle a un travail. Son revenu ne sera jamais le sujet, comme s’il était négatif, son travail non plus, inexistant. Tout tourne autour de l’obsession du héros, qui n’a pas de travail et au nom de cette humiliation (c’est lui qui doit avoir un travail), se permet d’être invivable. Le salaire de sa femme ne semble pas suffisant pour payer les traites de cet ex bel appartement parisien… il sera tout de même suffisant pour que plus tard, elle emménage dans un studio à Paris. Dans ce récit, la vie n’est vivable que si l’homme a un revenu dans le couple.
Quant à ce personnage d’ouvrier qu’est devenu Alain Delambre, ne vous y fiez pas : c’est en fait un homme qui a fait des études, qui a été cadre, un ex CSP+. Il a pour copain un ancien informaticien génial qui vit dans une caravane, déclassé lui aussi, mais tout autant CSP+ à l’origine (et qui pratique l’informatique magique, mais passons).
On retrouve visiblement le profile d’un nouveau héros à la mode ces jours-ci (c’est le 3e que je vois de ce type dans l’année) : il a entre 50 et 60 ans, il a eu des heures de gloire, il n’arrive à plus rien, tellement plus rien que son impuissance sexuelle est même signalée, il est infect avec sa femme et ses enfants parce que son drame personnel l’autorise à être chiant. Puis, il va avoir une action remarquable dans l’espoir de retrouver sa fierté et sa famille comme avant (et en général, ça marche).
Dans ce schéma, on retrouve le mythe de la masculinité héroïque en plein : Delambre prend en otage ceux qui le rendent misérable. Et par la même occasion, il rend encore plus difficile la vie de sa famille, tout en disant qu’il fait ça pour eux. Lui semble savoir ce qui est bon pour les siens : ce qui est bon pour lui. Le film passe à côté de cette critique : elle est à peine évoquée, uniquement via les discours de Delambre et de son ami à propos des femmes de sa famille… qui restent la plupart du temps figurantes passives ou téléguidées de ce drame, emprisonnées dans les projets de l’homme. Et son discours fait foi.
Vers le milieu de la série, le récit change et on est plus sur du Thriller que sur une lutte sociale… et finalement, il est là, le couac, ce n’est pas un film de lutte sociale. Ce n’est pas une critique de l’ordre social. Un rapprochement avec Breaking bad m’est venu (qui est une excellente série).
À la fin de Breaking bad, le héros qui, lui aussi, ne cesse de répéter qu’il fait tout ça pour sa famille ou pour combattre le système injuste, avoue finalement à sa femme que tout ce qu’il a fait, il l’a fait pour lui, et pour lui seul. Alain Delambre n’aura jamais cette honnêteté… et la série non plus. Jamais on ne discute ce bien-fondé masculin à réclamer le respect à coup de boule, à coup de prise d’otage, et jusqu’au bout, s’il le faut en sacrifiant sa famille, une femme et deux filles, qui sont des saintes, car presque toujours partantes pour le sacrifice puisqu’elles n’existent que par leur lien de parenté avec le héros.
Ça aurait pu être une série critique du management, de la gestion par les actionnaires, des injonctions viriles qui pèsent sur les hommes… Mais il n’y a pas d’ouvriers dans cette prétendue fable sociale et il n’y a pas de remise en question des rôles sociaux. Dépouillé de ce faux habillage, c’est un sympathique thriller avec Cantona très bon dans son rôle.