Kro pour vous éviter d’aller au cinéma

lucy-affiche-us-2014-08-7-21-45.jpgLucy de Luc Besson, avec Scarlett Johansson et Morgan Freeman

Je ne vais pas tourner autour du pot pendant 2 heures : Lucy est un film très mauvais. Tellement mauvais qu’il n’y a rien à l’intérieur qu’on peut sauver. Ah, si, Scarlett Johanssson est sexy. Rendez-vous compte, c’est mon meilleur argument pour défendre ce film, c’est vous dire si je suis désespérée.

Après cette entrée en matière sans appel, il va falloir que je prouve un minimum ce que j’avance. Alors on y va. Je vais essayer de ne pas trop spoiler, mais comme le scénario n’a pas d’intérêt, finalement, c’est pas si grave.

Tout commence par un film de mafia, version triade de Hong Kong. Une jeune étudiante est envoyée par un copain dans un hôtel pour livrer une mallette. Or cette mallette appartient à un gros ponte de la mafia dont l’équipe a la gâchette facile. On a le sentiment que Besson tente de faire un peu de Tarentino… des gros flingues, des affreux qui aiment le sang (là on pourrait être dans Léon) mais des tentatives d’humour incongru qui passe plus ou moins. Jusque là, rien de grave. Il a pas l’humour déjanté d’un Tarantino, mais c’est distrayant.

Là où ça dérape sérieux, c’est au moment où Besson va se prendre pour Alain Resnais. Lucy, la jeune étudiante, va soudain avoir, par accident, la capacité de son cerveau qui va augmenter. Elle n’aura plus accès à 10%, ni a 20%, ni à 40% mais, je vous le donne en mille, Mesdames et Messieurs, à 100% de son cerveau. Oui, ma bonne dame, vous avez bien entendu : 100%. Et comment cela s’explique-t-il ? On va vous faire un cours à la mode d’Alain Resnais dans Mon oncle d’Amérique. Plagiat ou hommage ? j’avoue que je me pose la question. Pour moi, un hommage, c’est un clin d’oeil subtil plus une valeur ajoutée ou une réinterprétation. Là, ben, c’est une juste pauvre copie.

affiche-2014-08-7-21-45.jpgDans Mon oncle d’Amérique, Alain Resnais est allée chercher Henri Laborit, un des plus grands spécialiste français des neurosciences de son époque. En prenant des populations de rats comme modèle, Henri Laborit explique des comportements humains, illustrés ensuite par le film de Resnais. Scientifiquement parlant, ce film a été critiqué (les humains ne sont pas des rats, les explications sont réductrices…) Mais ce film est célèbre et a fait date dans l’histoire du cinéma pour sa manière de mélanger discours scientifiques et scénario. Cinématographique, c’est une réussite.

Besson tente de faire pareil : il entrecoupe ses scènes de plan animalier illustrant la scène, ayant pour but probablement de nous faire comprendre que l’homme est un animal. Cet entrecoupage est lui même entrecoupé d’une pseudo conférence scientifico-philosophico-fumeuse de Morgan Freeman, nous expliquant l’évolution humaine, le développement du cerveau, le sens de la vie et le reste. Au moins, quoiqu’on puisse en penser, Henri Laborit, c’était un vrai scientifique.

Et ça dure, et ça dure. La bouillie morale et philosophie trempée dans la neuroscience et la sociobiologie n’en finit plus.

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Et enfin, Lucy arrive à Paris pour rencontrer Morgan Freeman. Ouf, le cours est fini : le temps c’est de la matière, l’immortalité ou la reproduction, c’est le but des organismes. Vivre, c’est transmettre. Trop bien.

Cette fois, Besson va s’auto-plagier dans Taxi parce qu’on est jamais mieux servi que par soi-même. Les voitures de flics volent et s’empilent par pack de 6. Il y a quand même une chose d’original : c’est la première fois que je vois une fusillade à la Sorbonne (remaquillée en fac de science). Là, Morgan Freeman et 4 autres neuroscientifiques (on les identifie facilement, ils ont tous une blouse blanche pour taper sur un ordinateur) vont faire des têtes d’ahuris jusqu’à la fin du film. Morgan Freeman doit être le seul être en blouse doué de la parole d’ailleurs. Les autres se contentent de moduler sur le visage diverses formes d’hébétude.

lucy-2014-08-7-21-45.jpgQuant à Lucy, c’est une vraie héroïne à la Besson, un clone de Nikita ou de Lilou dans le Ve Elément. Elle a l’air fragile et perdue au début. Ensuite, elle a des super pouvoirs qu’elle obtient par magie (elle y est pour rien, ça lui tombe dessus) et elle devient super invincible. Sauf que si on arrive à s’intéresser à Nikita (qui a travaillé dure pour être une bête de combat) ou à Lilou, Lucy, on s’en moque éperdument. Elle nous dit qu’elle perd son humanité ? On s’en tape. Finalement elle aussi. Elle embrase un flic parisien ? On s’en fout. Et deux secondes après, elle aussi. Les tueurs sont ridicules, le flic se demande ce qu’il fait là (il a même l’honnêteté de le dire dans le film, mais ça doit pas être fait exprès) et Morgan Freeman a du perdre un pari (même pas cap’ de tourner dans le dernier Besson ?).

A la fin du film, Besson se prend pour Kubrick dans 2001. On a tout, mais en pas réussi : des singes, du monolithe, de la masturbation visuelle avec des galaxies et des cellules (l’infiniment grand et l’infiniment petit, tout est dans tout, et la vie est un fleuve). Souvenez vous, Lucy, c’est le premier humain intelligent, on vous le dira au début du film, on vous le re-martèlera à la fin, pour les spectateurs qui n’utiliseraient que 3% de leur cerveau pour suivre ce film et l’apprécier (au dessus des 3%, on ricane).

Bref, les critiques m’avaient vendue un bon film d’action avec un scénario tournant à la bouilli philosophie. Je vais retourner voir Transformer 4. A côté de Besson, Optimus Prime, c’est Nietzsche.

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