Le livre de toutes les heures de Hal Duncan
Tome II : Encre
Souvenez vous de la kro précédent pour le tome 1: Vélum
Encre continue dans la même veine, peut-être un peu moins destructuré… où alors on s’habitue…
Un jour, le trône de Dieu… (ou plutôt : de dieu) a été laissé vacant et les amortels se sont battus pour la place. Métatron le scribe a écrit le livre de toutes les heures pour créer le Vélum, c’est à dire l’univers multidimensionel, en même temps que le Livre. Avec l’Alliance, il a précipité le vélum dans le chaos, en voulant prendre le pouvoir. En 1929, en 1914, en 2026, toujours la même guerre, toujours des totalitarismes. Dans des replis du Vélum se cachent des Havres, où des Ducs, rescapés de l’Alliance, se protègent de l’Hinver post-cataclysmique qui règne au dehors en jouant au dictateur.
La couverture du Tome II, comme celle du tome I, est une réussite : Arlequin dans la position de Shiva.
7 amortels ont refusé de s’aligner dans la guerre menée par Metatron. 7 amortels qui sont peut-être plusieurs facettes d’un même être, qui vivent à plusieurs endroits du vélum sous différents avatars… ils sont frère et soeur, ou amant, ou mère et fils, amis, ennemi, tous ont juré qu’ils ne voulaient plus de ce genre de cataclysme. Ils veulent réécrire le Livre, une fois pour toute, sans fachisme, sans stalinisme, sans futurisme. Mais pour cela, il faudrait qu’ils retrouvent, l’original dans un des plis du Vélum. Il faudrait aussi qu’ils se retrouvent eux, et leur mémoire endommagé par l’Hinver, qu’ils se souviennent de la Cryptolangue qui permet de créer, de se battre, de faire advenir, de détruire, de dire le nom de dieu.
Il y a Jack Flash / Jacques Carter le cinglé / Arlequin, l’éternel anarchiste, toujours amoureux de Puck / Thomas / Tamuz, si séduisant, si jeune, si érotique, Anna / Innanna / Anesthesia la chasseresse, la guerrière, Finnan / Prométhée / Le Roi Finn, toujours révolté contre les puissants, Joey Narcosis / Péchorin, le traitre, la part sombre du groupe, Guy Fox / Reinhart, celui qui écrit, qui conçoit les plans, Don Coyotte, celui qui raconte.
Le noeud de l’histoire, c’est peut-être cette histoire d’amour continuelle, sautillante, pornographique entre Puck et Jack, qui serait tellement joyeuse si Puck ne mourrait pas dans tous les plis du Vélum. Car Puck, c’est Matthew Sheppard, ce jeune gay torturé et tué dans le Wyoming en 1988.
Hal Duncan fait partie d’un genre de littérature qualifiée de “New Weird” avec China Miéville. On pourrait qualifier le style de fantastico-politique urbain avec de la SF habillé en fantasy. Je sais pas si je suis claire.
Aussi bizarre que cela paraisse, il y a effectivement des points communs, finalement, entre Miéville et Duncan, bien plus qu’entre Le livre de toutes les heures et L’échiquier du mal, comme le prétend la 4e de couverture.
Je mets pour finir un extrait de critique trouvé sur http://efelle.canalblog.com/ qui résume bien ce que j’aurai pu dire :
“Plus accessible que Vélum, Encre n’en reste pas moins un numéro de virtuose alternant ses styles de narration. Théâtre, roman d’espionnage, film noir ou d’aventures, script de scénario, contes, réécritures de mythes ou de textes religieux… Plongée dans le Vélum ou feuilletage du Livre de Toutes les Heures, le voyage est vertigineux. Hal Duncan manient ses archétypes et ses allégories avec précision, contant une magnifique histoire, nous rendant accessible son érudition. Le diptyque Vélum – Encre, bien qu’étant une lecture exigeante n’en constitue pas moins une belle réussite.”
“Et je prie pour que la Cryptolangue et le Livre existent vraiment, pour que les générations futures puissent y lire les patronymes de tous les innocents assassinés au nom d’idéaux déments, pour qu’elles puissent les pleurer. Que les crimes des généraux et des démagogues responsables de cet enfer marquent ces hommes au fer rouge, comme ce fut le cas du premier assassin. Que leurs forfaits infâmes soient gravés dans leur chair ! Je veux prier pour que quelqu’un paye.”