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Et pendant ce temps, le chat surveille l’avancée des travaux…

Le choeur des femmes de Martin Winckler

Dans la peau d’un noir

L’étranger d’Albert Camus

A Vancouver, tourne à gauche par Sébastien Chion

arton954 Le choeur des femmes de Martin Winckler

Jean se destine à une brillante carrière hospitalière, dans le domaine de la chirurgie gynécologique, mais avant, un stage de 6 mois lui est demandé dans une unité un peu particulière, où un médecin bourru et atypique reçoit des femmes en consultation gratuite autour de questions de contraception.

La croisade de Martin Winckler contre la mauvaise médecine, celle qui méprise les patients, se poursuit, en particulier en ce qui concerne les femmes et leur contraception. Dans « Contraceptions mode d’emploi », il signalait qu’en fac de médecine, il se souvenait d’un professeur qui avait écrit sur le support de cours que la gynécologue s’apparentait à la médecine vétérinaire dans le sens où le discours des patientes étaient totalement inutile à la compréhension de la maladie.

Ce livre est un roman didactique, ce qui me gène toujours un peu (je préfère qu’on choisisse son camp : roman ou essai. Mener les deux de front n’est pas un exercice facile). En outre, on connait le côté « donneur de leçon » de Martin Winckler.

Néanmoins, il est indiscutable que la succession des cas et des patientes ainsi que la manière dont elles sont prises en charge sont très instructives.

Ca vous amène à regarder d’un oeil neuf votre gynéco et les pratiques que la médecine vous impose.

J’ai une collègue qui fait étudier « Le choeur des femmes » à ses étudiants en médecine et il est certain que ça ne leur fait pas de mal.

Donc, quoique j’ai pu dire sur le côté didactique du roman, il est passionnant et on ne le lâche pas jusqu’à la fin.

333397_9413161Dans la peau d’un noir de John Griffin

C’est un classique de la littérature américaine que j’ai trouvé trainant sur une table à l’Uni. C’est l’histoire vraie d’un journaliste américain blanc du sud qui a envie de découvrir réellement ce que c’est d’être noir au sud des Etats-Unis, à la fin des années 50.

Pour y parvenir, il prend un traitement médical assorti d’une dose d’UV et il devient un noir tout à fait plausible.

Il va alors vivre la ségrégation en étant du mauvais côté de la barrière : depuis les mesquineries d’un chauffeur de bus blanc qui « oublie » son arrêt jusqu’aux kilomètres qu’il faut faire en ville pour trouver des toilettes publique pour noirs, alors qu’on travaille dans un quartier de blancs. Boire un verre d’eau nécessite tout un périple : il faut trouver un bar où on sert les noirs…

Outre ces difficultés, il bénéficie également de la solidarité des noirs, qu’il dépeint tous comme de braves hommes travailleurs qui tentent de s’en sortir malgré une situation profondément injuste.

Ce texte n’est pas vraiment un reportage, plutôt un essai qui se veut convaincant : les noirs rencontrés sont tous trop honnêtes, trop sympathiques, trop dévoués. Si je ne doute pas qu’ils existent, je pense que l’auteur a dû occulter une partie de ses rencontres puisqu’il ne cache pas, par ailleurs, la criminalité et le danger dans les quartiers noirs. L’auteur veut convaincre son lectorat que si les noirs sont pauvres, font moins d’études et sont plus souvent des criminels que les blancs, ce n’est pas parce qu’ils sont de race inférieure, mais parce que la ségrégation, ce n’est pas l’égalité des chances dans deux mondes séparés, mais une violence discriminatoire au quotidien, qui s’applique dans les grandes choses comme dans les petits détails de la vie. Malgré ces limites, c’est un témoignage intéressant qui permet de mesurer la distance qu’il a fallu pour qu’un noir deviennent président de ce pays.

cover_webA Vancouver, tourne à gauche par Sébastien Chion

Voici un roman auto-édité par son auteur, que je connais depuis pfffu, oulala, ça nous rajeunit pas tout ça, sauf qu’il devait avoir 9 ans… c’était y’a plus de 20 ans (pour vous donner une idée…, en gros).

Bref, l’auteur a grandi, il est parti à Montréal, est tombé en amour avec cette ville (comme on dit là-bas) et puis, voilà qu’il a fait un truc fou. Un truc qu’on rêve souvent de faire, mais qu’on n’ose pas réaliser. Un truc qu’on ne peut faire que si on est célibataire et sans enfant… mais peut-être qu’il le fait justement parce qu’il a dû mal à être célibataire. Il met ses économies dans un van, il loue son appart et il part. L’idée ? Aller tout droit jusqu’à Vancouver et là, tourner à gauche.

Le début donne le vertige : la dernière soirée avant le départ, le carton de choses qu’on emmène mais qui ne servent sûrement à rien, les raisons pour lesquels on part qui ne sont sûrement pas les vraies raisons… Evidement, en tant que lectrice, on se projette… Qu’est-ce que je prendrais ? qu’est-ce que je ferai à cette dernière soirée ? qui je verrai ?

Le vertige se poursuit avec le récit du lendemain… le temps ne compte plus. Pas de planning, pas d’agenda, pas de deadline. Il n’y a pas la fin des vacances, le temps qu’il faut pour aller jusque là, est-ce que je pourrai revenir à temps ? Parce que justement, tout cela n’existe plus.  Il ne revient pas, où peut être que si, mais peu importe : tout est ouvert sans limite de temps ni de distance.

Plus que les paysages nord américains, c’est peut être là qu’on a la plus grande sensation de liberté dans ce livre : le temps ne compte pas.

Pourtant, ce roman, cette autofiction, comme dit l’auteur, n’est pas d’abord un récit de voyage, mais un récit de rencontres. Parce que sur la route, il va croiser des gens, des filles surtout, qui vont faire un bout de chemin avec lui, qui vont l’héberger un peu, avec lesquelles il va beaucoup parler. Finalement, il part pour être seul, mais il ne fait que chercher des compagnes de route, non pas pour une aventure romantique, mais pour de la compagnie, pour la rencontre.

Si vous voulez vous faire une idée par vous même, allez voir ici : http://www.avancouvertourneagauche.com/ ce que ça donne, lisez le début, voir si vous vous sentez partir avec l’histoire.

Moi, j’ai lu l’ensemble très vite et j’attends la suite…

C389tranger-2013-08-27-11-12.jpgL’étranger d’Albert Camus

C’est tout à fait par hasard que j’ai lu L’étranger de Camus. Un roman monstrueusement célèbre, peut-être passé de mode, bref, le genre de roman dont tout le monde a entendu parlé mais qu’on ne lit plus. Grâce à une copine de ma fille qui anticipe le bac français et l’avait emporté en vacances, je l’ai lu. Ca faisait pourtant un moment que je voulais le lire, parce que ma mère m’en avait parlé, que ça se passe en Algérie française, et qu’il y a une chanson de Cure qui en parle (Killing a Arab).

C’est un roman court, magnifiquement écrit, avec un style et un rythme impeccable, tellement maîtrisé que ça ne pèse pas. C’est l’histoire d’un homme qui suit le cours de sa vie sans chercher particulièrement une finalité, un but à ses actions. Les choses se produisent comme elles doivent se produire, il n’éprouve pas vraiment d’émotions, puisqu’il fait ce qui doit être fait (que dire de plus ?) ou alors qu’il ne peut rien sur un certain nombre d’événements qui se produisent autour de lui (et donc, inutile d’en débattre).

L’histoire est racontée à la première personne, un peu comme le serait un journal, l’introspection en moins. Meursault se contente d’aligner les faits et les événements. Son absence d’émotions, son déphasage avec la réalité, l’empêche de comprendre pourquoi son attitude semble à ce point inappropriée aux autres, à moins que cela l’indiffère. Cette manière de se laisser porter par les événements du monde, d’enchaîner les actions sans but, mais sans se référer non plus à quelque chose de plus grand que soit, cette philosophie des choses est datée, c’est globalement les années 50, Sartre et l’existentialisme. Le fait qu’on n’écrirait plus de roman ainsi donne à cette histoire un aspect étrange.

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