Voici donc le moment de vérité pour conclure la Kro. Alors, San Francisco, finalement, c’est comment ? Tout d’abord, ce n’est pas comme je l’imaginais. Je pensais que c’était une ville bien plus hi-tech, plus hype, plus influencée par les géants de la Silicon Valley toute proche. En réalité, c’est une ville en transition, entre son passé hippie et peut être son futur hipster, mais la modernité à mode New-yorkaise ne se voit pas. On a le sentiment d’une ville davantage attachée à son passé qu’en route vers l’avenir numérique. En même temps, ce n’est plus une ville hippie, même si on peut fumer des joints assez facilement et que les images de seins nues peuvent s’afficher dans les rues. Les manifestations du « Flower power » se retrouvent plutôt dans les musées et rétrospectives. Ici le De Young Muséum, dans le Golden Gate Park, un bâtiment qui ressemble à Uni-Pignon, à Genève, avec sa couverture en grillage, et qui ne me convainc pas plus. Le Musée d’Art asiatique met lui aussi le Flower Power à l’affiche. C’est aussi une ville plus facile que New York, moins speed, qui bombarde moins d’information en tout sens, bien plus espacée, avec des immeubles bas, sauf dans le financial district, assez petit. Vous noterez que jusqu’à présent, il n’y avait aucune photo de la célèbre Chinatown de San Francisco. Nous avons traversé plusieurs fois ce quartier, quasiment au centre ville. La communauté asiatique est effectivement énorme et il y a des écritures chinoises sur les devantures des magasins dans toute la ville, encore plus que de traduction espagnole, l’autre très grosse communauté. Il est d’ailleurs difficile d’identifier l’accent californien, dans le sens où l’essentiellement des gens avec qui j’ai parlé (personnel d’hôtel, de restaurant, de magasin) appartenait à l’une de ces deux communautés. A part ses portails d’entrée, le quartier ressemble au Chinatown de New York ou de Paris.
Même s’il est ancien, (c’est la plus ancienne et plus grande communauté chinoise hors de Chine), il a lui aussi subi le tremblement de terre et a très peu de constructions remarquables. Les migrants chinois venaient majoritairement travailler dans les compagnies de chemins de fer pour les hommes, et la prostitution pour les femmes. Malgré un grand nombre de lois racistes et de ségrégatives, comme partout aux Etats-Unis, San Francisco est l’endroit où les Chinois peuvent posséder leur terre et la transmettre. (Par exemple, en ce qui concerne le statut des Chinois aux USA, ce n’est qu’en 1943, soit après les femmes et les Noirs, que le Chinese exclusion act, qui excluait spécialement les Chinois du droit de vote et de la citoyenneté, a été aboli). San Francisco, c’est aussi la ville gay historique, tout simplement parce qu’au moment de la seconde guerre mondiale, les militaires coupables d’obscénité (c’est à dire gays) étaient débarqués à San Francisco et restaient bloqués là, sans oser rentrer dans leur famille.
Là encore, on voit comment un ghetto se forme : comme pour les Chinois, qui n’avaient pas le droit d’habiter ailleurs que dans le quartier chinois, les gays se sont regroupés pour se protéger là où on voulait bien les laisser vivre, tout d’abord le quartier misérable (et toujours misérable) de Tenderloin (pourtant situé en plein centre ville, à deux pas des plus grands magasins et de l’hôtel de ville.
Nous ne sommes pas allées à Castro, quartier gay originel, (là où se trouve la « Maison bleue » de Maxime le Forestier). Là non plus, le quartier n’est pas très joli et malheureusement, nous avons manqué la Pride de 15 jours, même si dès le 1er juin, la ville commençait à hisser les drapeaux arc-en-ciel.
San Francisco est une ville attachante plus que jolie, grâce à son histoire et son mélange de population. Une ville créée par la ruée vers l’or, sur les terres de John Sutter, un négociant suisse qui a été paradoxalement ruiné par la découverte de l’or dans les rivières de son domaine. Il n’a pas pu endiguer l’assaut des prospecteurs sur ses larges propriétés, et s’en est retrouvé de fait dépossédé. A l’époque, l’Etat de Californie n’avait pas vraiment les moyens de faire respecter l’ordre.
San Francisco, c’est aussi une ville hors de prix (croyez-moi, j’habite Genève). Peut-être y a-t-il moyen de manger pas trop cher ou de faire des « choses » pas trop chères quand on connait, mais en tant que touristes, dans tous les endroits qui ressemblent un peu à des endroits dans lesquels on a envie d’entrer, c’est hors de prix. C’est en effet une ville vraiment très touristique, tellement touristique que les grandes maisons avec bow-window sont transformées en HLM Air B’nB, ne simplifiant pas les problèmes de logement. Ces 3 superbes maisons, avec vue sur la baie étaient désertes et en y regardant mieux, elles étaient nombreuses dans ce cas. San Francisco, avant tout, c’est cette vue incroyable.
1 réponse à San Francisco : alors, c’est comment ?