Cités

Gonedelyon. Rue Gambetta, VenissieuxLus dans le reportage de Mathieu Magnaudeix A quoi ressemble une banlieue à Berlin ?, les propos d’une habitante de Marzahn ayant séjourné à Vénissieux : «Ce que j’ai vu m’a effrayée. Les rues étaient vides, la cité tellement grise. Je ne trouve pas Marzahn très joli. Si je pouvais, j’habiterais ailleurs. Mais par rapport à Vénissieux, ici, c’est idyllique.»

Dans ce reportage, on apprend que Marzahn est un grand (immense) ensemble de l’ancienne RDA qui, après la réunification, a bénéficié du programme Soziale Stadt. Ce plan de réhabilitation conférait un rôle important aux habitants organisés en conseils de quartier. Et même s’il ne peut évidemment pas enrayer la montée fulgurante des inégalités sociales en Allemagne, ce programme ressemble plutôt à une réussite.

Au passage, cela nous rappelle que les émeutes urbaines françaises sont surtout une expression des “déceptions de l’Etat républicain” (Carsten Keller) et la marque d’un haut degré d’assimilation, comme l’explique également Jock Young dans Ce vent qui nous fouette. Les insurrections urbaines en Europe :

“La population immigrée est perçue comme une source de criminalité, de drogues, de prostitution et de violence. Mettons les choses au clair : la recherche en Grande-Bretagne indique sans aucune équivoque que la première génération des immigrés a un taux de criminalité inférieur à celui de la population autochtone. […] C’est la seconde génération […], qui a davantage assimilé les valeurs de la société dans son ensemble, qui ressent avec le plus d’acuité les privations. […] Incivilités, criminalité, émeutes sont vues comme un produit du manque d’assimilation des valeurs et des vertus civiques du pays d’accueil. […] Ce que je défends est totalement à l’opposé de cela : les troubles arrivent à cause du degré d’assimilation. […] Les jeunes Asiatiques qui ont participé aux émeutes dans les villes du nord avaient les mêmes attentes que les jeunes blancs qui y participaient de l’autre côté de la ligne ethnique. Ils n’avaient pas trop besoin d’apprendre la citoyenneté ou l’anglais – ils savaient très bien [que les mauvais agissements de la police] constituait une violation de leur citoyenneté au même titre que leur colossale exclusion du marché du travail national.”

L’ex-RDA n’avait pas le monopole des méga-ensembles. A Hanovre, on m’a montré le Ihme-Zentrum, un délire de cerveau d’architecte malade aujourd’hui en pleine déréliction. Le concept, trop fun, est celui de “ville dans la ville” : habiter, travailler, faire ses courses, sortir… les gens devaient pouvoir tout faire dans cet ensemble sans jamais avoir besoin d’en sortir.

Barbara Thalheim. Vorsicht ! Frau ! (fragile)Ca me rappelle la Part-Dieu. J’ai un sens de l’orientation plutôt bon, je sais toujours à peu près où sont les points cardinaux et quand j’arrive dans une ville, j’en ai très vite une sorte de plan général dans la tête. Sauf dans le quartier de la Part-Dieu, où je suis systématiquement complètement déboussolée et où je ne sais toujours pas, après avoir pourtant consulté mille fois un plan, qui de la gare ou du centre commercial est au nord ou à l’ouest. Je hais ces délires urbains mégalo, qui me font surtout l’impression d’avoir voulu nier frénétiquement toute fragilité – et qui du coup l’aggravent.

Pour pouvoir terminer ce billet architectural sur une touche un peu plus bucolique, il aurait fallu que je photographie le duplex splendide où j’ai été hébergée à Hanovre : pièces vastes (probablement dans les 140m2 au total), terrasses (oui, au pluriel), véranda, baies vitrées et hauteurs sous plafond, où vivent quatre étudiant-es pour 180€/mois chacun-e.

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