Kro des 8 décembre

8 décembre 1997

La rue St Jean est pleine de monde. Il fait très froid. Lyon vit dans une atmosphère de fête partagée. Les flammes des bougies si nombreuses aux fenêtres me font l’effet d’autant d’éclats de rire. Des spectacles de rue s’installent un peu partout et provoquent des attroupements. C’est artisanal, amateur et mais réussi et plein d’entrain.


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C’était l’époque de Chantelouve, ce magasin de jeux de rôles, tout au bout, derrière St Jean, où nous avons passé de nombreuses nuits dans les caves, à inventer des mondes et des histoires.

Nous nous retrouvons devant le magasin. Nous avons des amis qui jonglent, qui crachent du feu… Nous les regardons au risque de geler sur place, les doigts regroupés autour d’un vin chaud, trop brûlant pour être bu maintenant.

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Je me souviens de la scène, mais pas des personnes, si ce n’est Karine en robe médiévale qui passe faire la quête.

Hier, en fouillant dans les placards à la recherche d’autres antiquités, on a ouvert quelques cartons, on a fouillé dans des vieilles affaires et curieusement, ces anciennes photos sont ressorties… 1997, c’était aussi le temps de la photo argentique et du développement artisanal dans notre salle de bain !

On regarde les photos et on sourit de voir comme nos amis d’aujourd’hui étaient jeunes alors… et comme ceux qu’on n’a plus revu depuis n’ont pas changé !

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Le long de la montée du Gourguillon, les fervents catholiques montent à Fourvière remercier Marie.

Pendant ce temps, le carnaval sauvage défile en bas dans la rue, battant drapeau noir.

Deux dragqueens en tête, ils distribuent des préservatifs en chantant : « Si Marie avait connu l’avortement, on aurait eu moins d’emmerdements ».

Il fait vraiment très froid, mais j’ai envie de suivre leur joyeuse pagaille jusqu’à Fourvière. Nous rodons encore dans les rues et nous nous laissons prendre aux scénettes de rue, aux chants médiévaux, à la musique. Puis nous rentrons au chaud dans les caves de Chantelouve. La fête continue grâce au vin blanc de Yacine, alors que dehors, les gens rentrent. Nous ressortirons bien plus tard, dans les rues toujours froides mais maintenant vides avec l’envie de raconter cette soirée.

C’était l’époque du jeu de rôle et de Nephilim. C’était il y a 8 ans. Chantelouve n’existe plus et nos boites de jeu de rôles prennent la poussière dans une caisse…

8 décembre 2005

La fête des lumières représente maintenant un quart du budget des manifestations culturelles de la ville de Lyon et elle dure du 7 au 10 décembre.

Cette année, il ne fait pas si froid, mais il pleut de temps à autre. On vent toujours du vin chaud et des Kebabs au coin des rues. JP nous propose un dépliant qui nous explique où sont les diverses installations que la ville a mise en place.

Nous commençons par prendre le métro pour St Jean. C’est la première fois que je fais la queue pour prendre un métro à Lyon, mais à l’instar des Bruxellois, les lyonnais ne savent pas se tasser dans les rames de métro.

St Jean : il y a du monde dans les rues, mais c’est vivable. La cathédrale est éclairée de différentes lumières, des ronds de couleurs, des éclairages blancs et rasants qui font ressortir le relief… des projecteurs qui ciblent certaines arches, certaines fenêtres. L’effet est réussi.

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Puis, nous arrivons place des Célestins. Nous déambulons dans une curieuse installation que nous avons eu la chance de voir alors qu’il n’y avait pas trop de monde. Imaginez des tubes en plastique suspendus à un portique et qui pendent jusqu’à 40 cm au-dessus du sol. Ils sont légèrement éclairés d’en haut. On peut marcher entre eux, les tubes se balancent et en perdant leur parallélisme, ils changent les perspectives.

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De là, nous remontons jusqu’à St Nizier, une autre église sur laquelle on projette des contes. L’effet est plus décevant. Les dessins sont bien plats et l’animation est trop basse pour que nous puissions l’apprécier à travers la foule qui commence à augmenter.

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De là nous traversons le Rhône. Depuis le quai, les principaux bâtiments de la colline de Fourvière sont éclairés de projecteurs très blancs. Ils se découpent d’autant mieux que l’éclairage public est plus faible ou alors a changé de couleur : les lampadaires sont rouges ou bleus.

On tente de progresser jusqu’aux Terreaux où il y a un spectacle pyrotechnique, son, lumière. La place des Terreaux est grande, pour autant, il est impossible de l’atteindre. Il y a tellement de monde que ça devient dangereux : pire que le métro à 18h, sauf qu’en plus, les gens essaient de progresser.

Après 10 min de compression claustrophobique, nous arrivons enfin à nous échapper.

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Nous allons ensuite à l’Opéra. Sur le parvis, d’immenses pots de fleurs contiennent des tiges lumineuses vertes surmontées de fleurs rouges en bouton. La foule me décourage d’approcher. Et il faut dire aussi que la pluie me rend moins courageuse à mesure que je suis trempée.

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Nous remontons par la rue de la Ré(publique), surchargée de décorations de noël qui nous font une arche lumineuse. Les bouches de métro du côté de Victor Hugo souffle une sorte de brume odorante et colorée car éclairée par en dessous par un projecteur de couleur. Le parfum pique un peu les yeux quand on s’approche trop près, mais au moins, ça réchauffe.

En redescendant vers la place Bellecour, nous arrivons à Saxe. Il y a une vraie bonne idée de décoration sur l’avenue Jean Jaurès. Dans les arbres, sont suspendues de grosses boulles lumineuses : un arbre est plein de globes oranges, comme des gros fruits lumineux. D’autres portent de curieuses planètes mauves, bleues ou rouges, striées de brumes

La pluie a repris et ne s’arrête plus, on commence à être sérieusement mouillé et transis. Nous renonçons à aller jusqu’à la place Bellecour pour nous arrêter du côté de la rue de Marseille. Au sol, il y a une sorte de mini-jardin lumineux. La sobriété de cette installation-là me plait.

Nous montons ensuite finir le 8 décembre chez Mael’, qui était notre guide, en 1997. Mais on ne boira rien d’autre que du thé, cette fois.

Pas de nostalgie pour rien. J’ai toujours des amis avec lesquels je peux boire et rire toute la nuit. Si quelque chose me manque, c’est plutôt l’époque du jeu de rôle, le temps où les Nephilims marchaient dans les rues de Lyon, ce sont ces souvenirs qui sont liés pour moi à la fête du 8 décembre.

Aujourd’hui, la marie a pris en charge la manifestation et l’a techniquement perfectionnée. Les lyonnais ne sont plus acteurs, mais spectateurs / consommateurs. Ils bougent de place en place et regardent les lumières à distance. Le 8 décembre ressemble à la Nuit Blanche de Paris, de Bruxelles ou d’ailleurs.

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Lyon a-t-elle rêvé de se prendre pour une capitale ? Pour cela, elle a converti une fête locale en un événement digne d’attirer des touristes lointains : j’ai même croisé à Paris une québécoise qui faisait un crochet à Lyon pour voir les lumières le 7.

Sur ce plan-là, le pari est certainement réussi. Mais cette manifestation, même si elle est jolie, n’est pas plus lyonnaise que parisienne ou bruxelloise. Pourquoi ne pas la faire un 14 juillet ?

Reste les bougies que les lyonnais posent sur leurs appuis de fenêtre qui permettent de souvenir qu’il s’agit d’une fête pour tous. Reste aussi la procession à Fourvière et les panneaux qui disent «Merci Marie». La grosse machine qu’est devenu le 8 décembre n’aura pas entamé la dévotion des bonnes familles.

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Mais le carnaval sauvage, les cracheurs de feu et autres amuseurs des rues sont partis avec les Nephilims.

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