Kro spéciale Butler : L’universel (part. 4)

Qu’est-ce que l’universel ? Y a-t-il des droits universels ? L’universel est-il une forme de colonialisme ? D’occidentalisation forcée ?

A la fin : un mot sur la nécessité d’une écriture complexe.

« Comment comprend-on les formes que revêt la puissance d’agir dans le monde ? que signifie au Caire, par exemple, la liberté ou l’autodétermination ? par quels moyens de tels valeurs sont garanties ? Comprendre les êtres humains signifient connaître les ressources culturelles dont ils disposent, la signification de leurs actes dans ce contexte. Ces significations peuvent nous paraître bien étranges mais cela ne signifie pas qu’ils sont inférieurs ou qu’ils ne relèvent pas de ce qui est humain. Cela signifie que ce qui est humain doit être repensé dans le cadre d’une compréhension plus large. »

« Quand nous essayons de déterminer quels droits sont universels, nous devons aussi nous efforcer de saisir la signification qu’ont ces droits pour une grande variété de gens. Le processus par lequel on découvre leur signification et l’idiome dans lequel ils sont compris dans des lieux culturels variés constitue le travail de l’universalisation lui-même. C’est ainsi que quelque chose qui diffère d’une région à l’autre peut néanmoins faire l’objet d’un accord général. Si nous ne voulons pas que l’universel se réduit à l’imposition d’une culture occidentale à tout le monde, alors nous devons comprendre que ce qui est universel est l’objet d’une élaboration constante. »

« Nous savons que les femmes et les hommes doivent être traités à égalité mais nous ne savons à l’avance ce que cela signifie dans tel contexte donné. L’universel est un discours qui entre en crise de façon répétée sous d’effet des forclusions qu’il opère. Dans ce sens, l’universel n’est pas violent, c’est un processus ouvert et la tâche politique est de maintenir cette ouverture. »

Et enfin, une réponse à ceux qui l’accusent d’écrire de manière compliquée :

« Je suis préoccupée par le fait que la volonté de remise en question du langage ordinaire qui me semble importante pour la pensée critique et l’ouverture à la nouveauté a été dénigrée par ceux qui croient qu’il est de notre responsabilité d’écrire non seulement de façon à être accessibles mais de surcroit en respectant le cadre de la grammaire usuelle. Je ne défends pas la difficulté pour la difficulté. Mais je crois que le langage ordinaire contient des éléments qui entravent notre pensée, notamment à propos de ce qui est une personne, un sujet, la sexualité ou la politique. Il fut un temps ou la critique littéraire déconstructionniste était totalement tournée sur elle-même, au point de constituer une entreprise particulièrement étrange et déroutante à moins d’avoir été formée exactement comme ses auteurs. Un langage difficile est une épreuve mais aussi une absolue nécessité pour le développement d’une attitude critique à l’égard du monde social donné. »

C’est vrai que c’est compliqué à lire. Moi aussi je trouve ça compliqué. Mais si vous n’êtes pas spécialiste et que vous allez lire une publication de mathématique ou de physique, vous n’y comprendrez rien et cela ne vous choquera pas. Si cette publication est une vaste fumisterie, vous ne serez pas capable de vous en rendre compte. Les sciences humaines et sociales sont soumises à la même règle.

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