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The Bubble, film de Eytan Fox

Die Hard IV : retour en enfer, film de Len Wiseman avec Bruce Willis

The Bubble, film de Eytan Fox

3 jeunes israéliens vivent en collocation à Tel-Aviv, appelée The Bubble, car bien qu’elle soit à un jet de pierre des territoires occupés, la vie est déconnectée de la guerre.

Il y a Noam, disquaire gay, Yali, gay aussi gérant d’un café « trendy » et Lulu, vendeuse de produits de beauté mais qui aimerait être styliste.

Ils militent pour la paix avec la gauche israélienne, ils vivent leurs amours, bref, si ce n’était Noam qui doit faire sa période militaire sur un barrage à Naplouse, ils pourraient rester très loin du conflit.

Mais voilà Ashraf, croisé sur le barrage, qui débarque dans leur vie, et surtout dans celle de Noam. Sa vie à lui est bien plus complexe : il est clandestin gay quand il est dans sa famille à Naplouse, et clandestin palestinien tant qu’il reste à Tel Aviv avec Noam.

Le film commence avec légèreté : un peu comme un Friend gay à Tel Aviv. C’est dans cette partie d’ailleurs que Eytan Fox est le meilleur. Les scènes sur le barrage à côté de Naplouse sont édifiantes de l’humiliation quotidienne que subissent les Palestiniens qui passent la frontière, se mettre en rang, lever la chemise pour être sûr qu’il n’y a pas de bombe, montrer les papiers, déballer les affaires par terre, devant des soldats jeunots, super nerveux et en même temps embarrassé par leur mission. Les souvenirs d’enfance d’Ashraf à Jérusalem permettent également de resituer les torts. Mais l’’intransigeance de sa famille envers sont homosexualité et le fanatisme de son beau-frère évite de les transformer en saints martyres. Dans le même temps, on est enthousiasmé par cette jeunesse de Tel Aviv libre, laïque, exubérante, créative et tolérante. Mais on ne peut que constater qu’à la Rave pour la paix qu’ils organisent, ils ne sont même pas une cinquantaine.

Dans la 2e partie du film, l’histoire et la guerre les rattrapent. Là, le cinéaste perd sa légèreté et en fait trop dans le pathos, il veut être démonstratif, il l’était plus quand il restait faussement léger. C’est égal, The Bubble reste un bon film.

Die Hard IV : retour en enfer, film de Len Wiseman avec Bruce Willis

 
© Twentieth Century Fox France Galerie complète sur AlloCiné

 

C’est le 4e opus, vous connaissez le principe, Mc Lane, le gentil flic à la vie de famille perturbée va encore devoir se battre contre des terroristes.

On retrouve les ingrédients des autres films de la série : des terroristes, une menace qui va peser sur la famille de Mc Lane, des cascades et Bruce Willis qui récolte nombres de plaies, bosses, bleus et finalement balles, tout en gardant le sens de l’humour.

Je vous rassure, sur ce plan là, le contrat est respecté, sans surprise, mais respecté. Des cascades avec des hélico, avion, camion, voiture, ascenseur et une combinaison de tout ça (voiture dans l’ascenseur, camion contre avion…)

Ce qui m’a attiré pour voir ce film, c’est le côté Bruce Willis contre les hackers. Vous comprendrez, ma motivation était strictement professionnelle. J

L’attaque, cette fois, c’est du terrorisme virtuel : ils s’en prennent aux réseaux de communications et d’énergie des Etats-Unis pour flanquer la pagaille.

D’une part, nous avons le thème : flic à l’ancienne contre hacker moderne et bien sûr, pour rassurer le spectateur qui n’est pas un hacker, c’est plutôt les méthodes à l’ancienne qui vont être mise en valeur : arme à feu et coup de poing.

A la fin, d’ailleurs, quand les réseaux satellites sont tous en panne à cause des méchants, c’est grâce à une bonne vieille CB qu’on peut communiquer.

Ce qui m’intéressait, dans ce film, c’était de voir le chemin parcouru depuis Wargame.

 

Wargame, souvenez-vous, c’était 1983 : un jeune hacker, croyant pirater des jeux vidéos, entre par mégarde sur l’ordinateur du pentagone et enclenche la 3e guerre mondiale. Ce film a fait rêver nombre de futurs informaticiens qui en parlent encore.

Dans Die hard, un jeune hacker (mais plus vieux quand même que le gamin de Wargame), en croyant tester le système de sécurité d’une compagnie qui l’emploie, met en place un code qui va permettre craquer les systèmes de sécurité des réseaux financiers des Etats-Unis.

On appréciera dans Die Hard le fait que seule les USA sont menacées mais que pour autant on parle d’Armageddon et de retour à l’âge de la pierre. Dans Wargame, la guerre nucléaire ratissait plus large. Mais passons.

Dans les 2 cas, à plus de 20 ans d’intervalle, on a sensiblement la même figure du hacker : un jeune homme brillant, un peu hors la loi, fan de jeux et de SF, qui en toute inconscience a le pouvoir de mettre « la civilisation » en danger.

Dans les 2 cas, c’est ce jeune hacker qui va être capable de rectifier le tir, même si dans Die hard, il faudra avant tirer beaucoup de balles, jeter des voitures en l’air et faire exploser beaucoup d’objets et de véhicules.

Regardez bien : 20 ans d’écart, l’ordinateur s’est démocratisé, tout le monde ou presque l’utilise quotidiennement. Pourtant, derrière la multiplicité des usages, la représentation du hacker n’a pas bougé, elle revient même en force (et je ne dis pas ça parce qu’il y a un grand chauve musclé qui lui sert de garde du corps).

Une chose a changé tout de même : dans Wargame, l’ordinateur a un peu accédé à l’intelligence. S’il déclenche la 3e guerre mondiale, c’est parce qu’il ne se rend pas compte de ce qu’il fait, il croit jouer (on fait un petit tour par la théorie des jeux de Neumann en passant). Ce sont les informaticiens qui vont finalement le ramener à la raison.

En 2007, on ne croit plus à l’IA, pas plus qu’on ne cauchemarde sur la bombe. Le pouvoir, c’est la bourse et les flux monétaires. L’ordinateur est partout, il contrôle le monde mais ce sont en fait les personnes qui savent le contrôler qui contrôle le monde par son intermédiaire.

Le danger informatique, ce n’est plus l’ordinateur, mais c’est celui qui le contrôle. Le hacker est toujours là, il est encore plus puissant qu’avant, sympathique mais dangereusement gaffeur, ou réellement malfaisant. Il est brillant, asocial et misanthrope peut-être, mais il tient le monde dans sa main.

20 plus tard, l’usage de l’ordinateur a perdu de son mystère, sa maîtrise provoque des fantasmes de pouvoir encore plus grands.

Allez, je ne résiste pas à vous donner une citation de Norbert Wiener pour finir :

« Quand Dieu joue à un jeu avec sa propre créature, n’est-ce pas dénué de sens ? Quand un quelconque créateur, même de faible envergure, joue à un jeu avec sa créature, quel signification peut avoir ce jeu ? » God and Golem Inc. (1964 trad. 2000, Editions de l’éclat)

Et aussi : « Les personnes qui vont évoluer dans l’univers de l’informatique devront se soumettre aux règles de l’informatique sous peine de s’en voir refuser l’accès, c’est-à-dire qu’elles devront se soumettre aux règles des informaticiens. L’informatique permet d’ouvrir une fenêtre sur un monde d’ordre […]. Les informaticiens imaginent comprendre comment fonctionne l’univers réel en écrivant les règles qui permettent d’en décrire des portions. Mais imaginant que seuls les éléments pertinents de l’univers ont été modélisés, on oublie avec soulagement que le modèle est partiel. Avec l’ordinateur, on a l’impression de passer de l’autre côté du miroir. Dans l’univers de l’ordinateur, le hacker peut jouer à être Dieu. » (Collet 2006)

Ce film sert la soupe à fond à cet imaginaire du pouvoir.

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