Peau contre peau… avec la police

Ci-dessus Hanovre. A droite Kassel. Une “boutique policière” ouverte en 1994. Slogan : “La police au plus près” – enfin, traduit littéralement ça donne plutôt quelque chose comme “Peau contre peau avec la police“…

On peut entrer poser “toutes ses questions concernant les cambriolages et la protection de son domicile, librement et sans angoisse, pas comme quand on va les poser au commissariat”, dit en substance le texte.

Un ami de Hanovre qui a vécu en France jusqu’en 2008 me confirme qu’ici, le climat reste plus respirable que chez nous. On peut s’approcher des flics, les observer et même intervenir et taper le scandale s’ils sont en train d’abuser, lors d’un contrôle d’identité par exemple.  En général, ils n’aiment pas trop et battent en retraite. On ne finit pas direct en garde-à-vue comme en France. Pas encore, soupire-t-il.


Abus de garde à vue : la polémique
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Par ailleurs, j’ai trouvé à Hanovre un tract qui explique pourquoi et comment il faut harceler et agresser verbalement les militaires dès qu’on en croise un dans la rue, parce que ce n’est pas un métier comme un autre, que ce sont des meurtriers, que “l’armée est universellement un instrument de protection agressive des ressources” et “une manifestation des structures patriarcales, ce que la présence de soldates dans les rangs de l’armée ne change en rien“. Ce tract – ou plutôt ce dépliant en quadrichromie sur papier glacé – intitulé “Connaissance de l’ennemi”, présente notamment un tableau complet des épaulettes et des galons pour pouvoir situer sa cible dans la hiérarchie militaire. Au-delà d’un certain grade, en plus de les engueuler, de leur jeter de la peinture ou du parfum bas de gamme à la figure, de cramer leur voiture, on peut les agresser même physiquement. Man(n) oh Man(n) !

Et au sujet de “l’aide humanitaire désintéressée des militaires dans les zones de conflit“, un joli film de Barbara Thalheim sur la compagnie Tyabala et la pièce “La petite O.N.U., une fantaisie humanitaire” (sous-titré en français).

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Cités

Gonedelyon. Rue Gambetta, VenissieuxLus dans le reportage de Mathieu Magnaudeix A quoi ressemble une banlieue à Berlin ?, les propos d’une habitante de Marzahn ayant séjourné à Vénissieux : «Ce que j’ai vu m’a effrayée. Les rues étaient vides, la cité tellement grise. Je ne trouve pas Marzahn très joli. Si je pouvais, j’habiterais ailleurs. Mais par rapport à Vénissieux, ici, c’est idyllique.»

Dans ce reportage, on apprend que Marzahn est un grand (immense) ensemble de l’ancienne RDA qui, après la réunification, a bénéficié du programme Soziale Stadt. Ce plan de réhabilitation conférait un rôle important aux habitants organisés en conseils de quartier. Et même s’il ne peut évidemment pas enrayer la montée fulgurante des inégalités sociales en Allemagne, ce programme ressemble plutôt à une réussite.

Au passage, cela nous rappelle que les émeutes urbaines françaises sont surtout une expression des “déceptions de l’Etat républicain” (Carsten Keller) et la marque d’un haut degré d’assimilation, comme l’explique également Jock Young dans Ce vent qui nous fouette. Les insurrections urbaines en Europe :

“La population immigrée est perçue comme une source de criminalité, de drogues, de prostitution et de violence. Mettons les choses au clair : la recherche en Grande-Bretagne indique sans aucune équivoque que la première génération des immigrés a un taux de criminalité inférieur à celui de la population autochtone. […] C’est la seconde génération […], qui a davantage assimilé les valeurs de la société dans son ensemble, qui ressent avec le plus d’acuité les privations. […] Incivilités, criminalité, émeutes sont vues comme un produit du manque d’assimilation des valeurs et des vertus civiques du pays d’accueil. […] Ce que je défends est totalement à l’opposé de cela : les troubles arrivent à cause du degré d’assimilation. […] Les jeunes Asiatiques qui ont participé aux émeutes dans les villes du nord avaient les mêmes attentes que les jeunes blancs qui y participaient de l’autre côté de la ligne ethnique. Ils n’avaient pas trop besoin d’apprendre la citoyenneté ou l’anglais – ils savaient très bien [que les mauvais agissements de la police] constituait une violation de leur citoyenneté au même titre que leur colossale exclusion du marché du travail national.”

L’ex-RDA n’avait pas le monopole des méga-ensembles. A Hanovre, on m’a montré le Ihme-Zentrum, un délire de cerveau d’architecte malade aujourd’hui en pleine déréliction. Le concept, trop fun, est celui de “ville dans la ville” : habiter, travailler, faire ses courses, sortir… les gens devaient pouvoir tout faire dans cet ensemble sans jamais avoir besoin d’en sortir.

Barbara Thalheim. Vorsicht ! Frau ! (fragile)Ca me rappelle la Part-Dieu. J’ai un sens de l’orientation plutôt bon, je sais toujours à peu près où sont les points cardinaux et quand j’arrive dans une ville, j’en ai très vite une sorte de plan général dans la tête. Sauf dans le quartier de la Part-Dieu, où je suis systématiquement complètement déboussolée et où je ne sais toujours pas, après avoir pourtant consulté mille fois un plan, qui de la gare ou du centre commercial est au nord ou à l’ouest. Je hais ces délires urbains mégalo, qui me font surtout l’impression d’avoir voulu nier frénétiquement toute fragilité – et qui du coup l’aggravent.

Pour pouvoir terminer ce billet architectural sur une touche un peu plus bucolique, il aurait fallu que je photographie le duplex splendide où j’ai été hébergée à Hanovre : pièces vastes (probablement dans les 140m2 au total), terrasses (oui, au pluriel), véranda, baies vitrées et hauteurs sous plafond, où vivent quatre étudiant-es pour 180€/mois chacun-e.

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Truie Homo, top model et femmes effrontées

Personne avec jupe et personne de petite taille. Panneau de chantier à Kassel.Brèves de genre

  • Die Schwule Sau (la Truie Homo) était fermée le soir où j’étais à Hanovre, parce que l’équipe d’animation se lasse un peu de l’attitude trop attentiste et pas assez engagée de ses consommateurs usager-gères… Donc l’ouverture du bar, de la scène et tutti quanti est désormais intermittente et aléatoire, voilà, c’est comme ça, et si on en veut plus ben faut participer. Extrait du petit mot explicatif sur le site : “Eine Schwule Sau, die nur konsumiert wird, in der es kein Engagement gibt, die nicht als Chance gesehen wird, sich einen Ort anzueignen und einen Raum zu gestalten, einen Abend zum unvergesslichen Moment zu erheben – diese Schwule Sau wird es mit uns nicht geben.” Traduction (sans garantie) : “Une Truie Homo qui n’est que consommée, où il n’y a pas d’engagement, qui n’est pas vue comme une chance de s’approprier un lieu et de donner forme à un espace, de transcender les soirées en moments inoubliables, une telle Truie Homo ne se fera pas avec nous.” Faut-il y voir une bonne nouvelle (à Hanovre on garde de bons réflexes et la branchitude n’a qu’à bien se tenir) ou une mauvaise (l’engagement a faibli, donc) ?
  • Dans le train qui m’emmenait à Hanovre, j’ouvre le très centriste et très imposant Die Zeit (80 pages format A2 quand même) et dans le supplément week-end je tombe sur ce top model, nouvelle coqueluche des défilés de mode. Je n’ai trouvé aucune photo libre de droits à intégrer au blog, il faut donc cliquer ici puis pour le découvrir et pour comprendre pourquoi diablesse je cause soudain top model.
  • L’une des affiches de la campagne électorale en cours dit “Les femmes effrontées votent Die Linke !” L’argumentaire commence ainsi (traduction toujours sans garantie) : “La population mondiale se compose d’une majorité de 49% d’hommes et d’une minorité de 51% de femmes. Dans ce pays femmes et hommes ont les mêmes droits, pas les mêmes chances. Parmi les pauvres, les chômeurs et les parents isolés, les femmes ont la majorité, mais pour ce qui est de décider, elles ont peu.”
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Moins quatre degrés

Retour à Kassel. -4°, ce sera la température la plus haute aujourd’hui.
Même pas peur, comme il fait grand soleil, on part en balade à l’Orangerie et son Cabinet d’Astronomie et de Physique.
© Nomadpaper, August 18, 2007 Kassel. Orangerie.

Giuseppe Penone: Idee di Pietra (Ideas of Stone), bronze and stone, 2004/2010

On y croise cette nouvelle sculpture (c’est du métal) installée l’été dernier. Un petit avant-goût de la 13è dOCUMENTA qui se tiendra l’année prochaine.

Giuseppe Penone: Idee di Pietra (Ideas of Stone), bronze and stone, 2004/2010

Avant ça, on a mangé une soupe de légumes à la terrasse du Boléro. Oui, dehors au soleil, avec une couverture sur les genous. La soupe est bonne et les croutons sont en français dans le texte.

© tizzle. Bolero

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Hanovre, une ville très occupée

"La révolution c'est de la balle. Tout le reste, c'est du fromage caillé  (= de la foutaise")." (Rosa Luxemburg)
Comme de nombreuses villes allemandes, Hanovre a connu dans les années 80 un mouvement important de squats et d’occupations. Mais ici les autorités ont eu tendance, un peu plus qu’ailleurs du moins, à jouer la conciliation et donc, souvent, à légaliser les lieux occupés. C’est pourquoi aujourd’hui encore, Hanovre est truffée de centres sociaux autogérés, cantines populaires et autres ciné-clubs autonomes, quand souvent ailleurs les endroits de ce genre sont devenus des lieux branchés qui ne gardent des projets politiques autonomes originels que leur “design grunge”, et encore. Bref : on se sent tout de suite bien à Hanovre, on décide qu’on reviendra, et plus longtemps que ça !

Ne réglez pas par vous-mêmes les situations de racisme, sexisme, homophobie ou autres (?), parlez-en aux gens de la caisse ou de la thèque."L’après-midi, on combat le froid glacial par un petit thé dans un centre social autogéré, où des affiches dans les toilettes expliquent qu’il ne faut pas régler seul-e les situations de racisme, de sexisme, d’homophobie ou autres situations (übergriffige = qui se multiplient ?), mais qu’il faut en discuter avec les gens qui gèrent le lieu.

Le soir, lasagnes végétariennes dans une VoKü, une cuisine populaire où l’on vient manger à prix coûtant voire à prix libre. Les VoKü sont un mouvement politique qui a la bouffe comme moyen d’action et se situe en opposition et en alternative aux soupes populaires, dont il rejette la dimension caritative. Une antithèse aux restos du cœur en somme.

Pendant qu’on mange est projeté ce documentaire édifiant sur l’expérience libertaire de 36-39 en Espagne – un film qui aurait pu s’appeler, entre autres, “Rendre l’argent inutile en quelques semaines, mode d’emploi” :

Living Utopia – Anarchism in Spain from Cobb on Vimeo.

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Guerre

Bien brassée par l’exposition de Teresa Margolles, j’ai cherché à lire quelque chose qui aille un peu plus loin que “la violence des vilains cartels de la drogue” pour expliquer l’enfer dans lequel est actuellement plongé le Mexique (15000 morts en 2010). Plusieurs interrogations me taraudaient en repensant à l’expo : quels liens avec l’instauration de l’ALENA ? avec la répression des mouvements indigènes ? entre la “guerre au narcotrafic” de Calderon et la War on Terror de Bush ? quelle comparaison avec l’enfer algérien des années 90 ?

Il n’y a que dans cet article d’Alèssi Dell’Umbria que j’ai trouvé des éléments crédibles et intelligibles sur tout ça (article publié également ici la veille). Après, en cherchant un peu, on dirait bien que cet auteur n’est un grand fan ni de république ni de non-violence… Cf. par exemple cette interview de lui, qui date de septembre dernier et où on trouve un écho fracassant à la première “affaire MAM” sur la Tunisie :

“Tout ce qui est actuellement expérimenté dans les banlieues pauvres pourra servir en cas de soulèvement général, soit en France, soit dans divers pays d’Afrique où la France est présente. Il s’agit là de véritables savoir-faire, qui peuvent être exportés dans le monde entier ; ça a par exemple été fait dans les années 1960 : en matière de tactiques et de stratégie contre-insurrectionnelle, liée à l’expérience des guerres coloniales, la France a apporté une contribution unique, rarement mise en lumière – même la CIA a appris des Français pour ses opérations en Amérique latine.”

Et pour finir en images sur la “guerre à la terreur” :

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Fredonnée à Sarrebruck…

… au détour d’une conversation, retrouvée sur le web :


SANS LA NOMMER
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L’Ampelmann, un rescapé

Rassurez-vous, je ne vais pas faire un billet sur la  discipline légendaire des piétons allemands au feu rouge. Ce billet le fait déjà, et je confirme ce qui s’y raconte (parents qui vous engueulent de montrer le mauvais exemple à leur enfant, etc.)

En plus, contrairement à l’auteure de ce billet, cette “discipline” me va parfaitement bien, je préfère rêvasser au coin de la rue en attendant mon tour (ok, il fait froid mais bon) que manquer me faire écrabouiller alors que j’ai vert, comme ça m’est arrivé bien 4-5 fois le mois dernier en France. Je ne pense pas que les Allemands soient plus soumis à l’autorité que nous, j’ai même très souvent l’impression du contraire. Par contre, un minimum d’autodiscipline sur un minimum de trucs tout cons leur permet d’être infiniment plus zen sur tout. Et du coup aussi moins speed, moins parano, et au final justement moins autoritaire envers leur prochain-e. Parce que franchement, la “liberté” de traverser au rouge… La liberté, ce sera surtout quand on aura bouté les bagnoles hors de nos villes et de nos vies, m’est avis.

Non, j’ai envie de parler de l’Ampelmann, le petit bonhomme qui vous dit quand traverser, parce qu’à chaque fois que je le vois (donc souvent quand même), il me rappelle un texte qui m’a énormément aidée à piger l’Allemagne d’aujourd’hui. Ce petit bonhomme sous sa forme actuelle vient d’Allemagne de l’Est. C’est l’un des rares vestiges est-allemands après une réunification qui a toutes les caractéristiques d’un phagocytage en règle. En effet, cette réunification a surtout été l’occasion d’une gigantesque bataille culturelle et mémorielle entre l’Est et l’Ouest, comme l’éclaire donc cet article de Bernard Umbrecht. Un texte minutieusement documenté sur la manière dont s’est déroulé le processus d’unification et qui permet de dépasser les débats stériles sur l’Ostalgie : “C’était mieux avant” vs “Regretter une dictature, quelle horreur !”

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Je vous présente mon voisin

Tous les jours, quand je passe à la boulangerie, il est là derrière sa vitre à me regarder…

A deux pas de chez moi se trouve en effet le local du Tanz Ensemble Anduin (troupe de danse Anduin).

Le local semble un peu déserté en ce moment, et le nom de domaine tanz-ensemble-anduin.de n’a pas été renouvelé…

Bref, je doute d’arriver à apercevoir une répet un de ces jours…

En attendant, sur le web on trouve ça. Matez Golum, il est terrible !

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Espaces de vente vs espace public

Les Allemands sont de grands malades du centre commercial. Au centre-ville de Kassel comme à Sarrebruck ou ailleurs, on trouve facilement trois ou quatre galeries commerciales démesurées (plusieurs étages et tout) dans un tout petit rayon de moins de 2 km.
Citypoint-hertie, kassel
Ce n’est pas tant que les Allemands aient l’âme plus consumériste que nous. Je crois – mais je peux me tromper – que cela s’explique surtout par la destruction massive des centres-villes allemands par les bombardements lors de la WW2 : une fois que toutes les constructions historiques ont été rasées, implanter des centres commerciaux ou autre chose… En même temps, implanter des centres commerciaux plutôt qu’autre chose, ça reflète aussi un air du temps qui, enfin, pourrait bien être en train de changer aujourd’hui !

C’est sûr qu’en attendant, c’est un peu tristou ce grignotage marchand de l’espace public. Heureusement que j’ai de saines lectures sur l’espace public… oppositionnel 😉 et qu’il y a des élections fin mars pour colorer un peu tout ça… Oui vous avez bien vu, la première affiche ci-dessous est une affiche du Parti Pirate !

Attention, quand je dis “Chouette des élections” ou “Heureusement qu’il y a des élections”, ce n’est pas qu’un amour passionné de la “démocratie” représentative me subjugue soudain. C’est juste un tout petit peu de débat public à se mettre sous la dent…

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