Kro de A à Z

Pour en finir avec la domination masculine, de A à Z, par Catherine Marry et Ilana Löwy

Pour en finir avec la domination masculine, de A à Z, par Catherine Marry et Ilana Löwy

Ilana Löwy est directrice de recherche à l’INSERM et travaille sur les questions de genre liés à la biologie.

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Catherine Marry est directrice de recherche au CNRS. Elle travaille sur les femmes ingénieurs.

Ce lexique n’a pas la prétention d’être exhaustif, ni même exemplaire. Il regroupe 100 mots, choisis par les auteurs en raison de leurs centres d’intérêts, mais aussi pour l’humour. Il met en évidence la vitalité de la domination masculine et en particulier un de ses mécanismes les plus récurrents : celui de la légitimation de cette domination par des différences naturelles, biologiques ou psychologiques.

Ce livre est très agréable à lire parce que les différentes entrées sont courtes : entre 2 et 4 pages pour chaque mot.

On y glane des informations importantes et aussi amusantes, heureusement d’ailleurs, sinon, ce serait trop déprimant.

Par exemple, saviez-vous que la cellulite est une invention française qui a mis 30 ans avant d’atteindre les Etats-Unis ? La cellulite, drame du siècle, est une affection qui s’est baladée sur tout le corps. En 1937, le vrai problème des femmes, selon Marie-Claire, c’est la cellulite de la nuque, voire, la cellulite des chevilles. On vendait d’ailleurs des crèmes capables de la résorber. Il faut dire que les chevilles et la nuque étaient les seules parties visibles du corps des femmes. (Ghigi 2004)

Savez-vous pourquoi il y a toujours la queue aux toilettes des femmes et pas aux toilettes des hommes ? Vous allez voir, c’est mathématique. D’une part, les hommes mettent moins de temps que les femmes à uriner, non seulement parce qu’ils se déshabillent moins, mais aussi parce que qu’ils ont un « débit » plus important. Mais la principale raison est encore plus simple : les toilettes hommes sont généralement dotées du même nombre de sièges que les toilettes femmes mais possèdent en plus un certain nombre d’urinoirs, donc finalement, plus de capacité d’accueil.

Vous allez me dire : tout cela est futile. Pourtant, l’accès à des toilettes disponibles et propres est une condition nécessaire pour que certaines catégories de femmes puissent accéder à l’espace public sans contrainte, en particulier les femmes enceintes et les femmes âgées. Alors que les hommes, même âgés, peuvent se contenter de toilettes sales, de « sièges turcs », voire de pas de toilettes du tout. (Penne 2005)

Savez-vous pourquoi les femmes sont plus petites que les hommes ? le rapport de taille est stable, environ 10%, ce qui n’est pas énorme, mais tout de même constant. Est-ce « naturel » ? darwinien ?

D’abord, les comparaisons avec les animaux n’aident en rien. Chez les invertébrés, les femelles sont en générale plus grosses que les mâles et chez les vertébrés, c’est souvent le mâle le plus gros, à l’exception de la baleine bleue ou des gibbons, ou la femelle est la plus grosse ou du chat, chien et cheval, où il n’y a pas de différence.

Michel Bozon qui travaille à l’INED signale la préférence très marquée des femmes pour des conjoints plus grands qu’elles, symétrique d’ailleurs à la préférence des hommes pour des conjointes plus petites. Ce qui écarte de la compétition reproductive les hommes petits et les femmes grandes. Un couple Homme petit / femme grande est jugé mal assorti, ou au moins attire des remarques.

Un homme petit a statistiquement moins de chance d’avoir des enfants d’un homme grand (et idem pour une femme grande). Incidemment, la réussite professionnelle est également liée à la taille, pour les hommes : haute stature irait de paire avec autorité et compétence. (je sais, ya des exceptions.)

Bref, sur Internet, les femmes trichent sur leur âge et les hommes sur leur taille.

Cette explication sociologique se complète avec une explication plus anthropologique.

Priscille Touraille qui a passé récemment une thèse particulièrement brillante avec Françoise Héritier explique cette différence de taille par des inégalités alimentaires : chez les chasseurs-cueilleurs comme chez les horticulteurs-éleveurs, les femmes sont moins bien nourries que les hommes, notamment en protéines et graisses (sachant que les travaux des femmes sont au moins aussi pénibles que ceux des hommes). Le préjugé que les garçons ont besoin de plus de viande que les filles pour être grands et forts courent toujours dans nos sociétés (ma fille l’a appris à l’école cette année). Or, à travail également pénible, les femmes et les hommes ont besoin d’autant de nourriture.

Si aujourd’hui, les parents ne font plus de différence sur la manière dont ils nourrissent leurs enfants, les injonctions en direction des filles qui doivent rester filiformes nous ramènent au même déséquilibre.

Par ailleurs, l’adaptation reproductive aurait dû conduire à un dimorphisme de taille en faveur des femmes. D’une part, la capacité reproductive des hommes a peu avoir avec leur taille, mais d’autre part, le bassin des femmes s’est beaucoup rétrécit avec la marche bipède. Celles qui accouchent le plus facilement sont les femmes les plus grandes (la largeur apparente des hanches n’a rien à voir avec la largeur du bassin). Pourtant, si les femmes petites meurent davantage en couche, elles ont statistiquement davantage d’enfants.

Voici donc 3 exemples seulement de cette mine d’information, qui commence avec Accouchement et se termine par Violence…

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