Plusieurs fois, on m’a demandé de me lancer dans la rédaction d’une histoire du JdR, un domaine sur lequel j’ai beaucoup lu et je possède une documentation fournie (à défaut d’être complète). On m’a même proposé une fois un projet de coopération, suite à ma relecture de la traduction française de l’histoire du JdR de Steve Darlington, publiée sur la V.F. de Places to Go, People to Be.
Mais j’ai toujours refusé. Non seulement je n’ai pas le temps de me lancer dans un projet d’une telle envergure, mais je n’étais pas encore joueur pendant les toutes premières années du Hobby (ce qui fait que je ne me sentais pas franchement qualifié pour ce genre de rétrospective), et je suis en grande partie déconnecté de son évolution depuis une dizaine d’années environ.
Évidemment, il m’arrive parfois de me dire que je pourrais au moins compiler ma doc de façon à la rendre accessible au public ; et une fois ce travail fait, pour en faire une histoire du JdR rédigée, il n’y aurait plus qu’un pas. Mais la brièveté de l’existence me laisse penser que ça ne se fera jamais…
Quoi qu’il en soit, il m’arrive aussi de réfléchir spontanément à divers aspects du sujet.
Jusqu’à présent, ces réflexions d’un instant ne débouchaient sur rien, puisque je n’en prenais pas note. Mais finalement, je me suis dit que maintenant je pouvais toujours les noter ici, afin d’en faire profiter mes lecteurs (et, très hypothétiquement, de les reprendre si jamais un jour je décidais d’en faire quelque chose de concret).
Ma réflexion d’hier portait sur un aspect fondamental de ce genre d’études : la structuration chronologique. Et je me disais qu’on pouvait distinguer dans l’histoire du JdR des origines à nos jours quatre grandes époques, chacune correspondant grossièrement à une décennie :
– les origines, ou les temps héroïques, commenceraient avec les précurseurs de Dungeons & Dragons à la fin des années soixante, et couvriraient à peu près les années ’70, s’arrêtant après la parution de trois jeux majeurs : Advanced Dungeons & Dragons (dont la parution des trois livres de base s’échelonna de 1977 à 1979), Traveller (1977) et RuneQuest (1978).
– l’Âge d’Or, ou la grande époque, correspondrait à peu près aux années ’80. Le JdR se diversifie de façon à occuper un grand nombre de « niches écologiques », et il s’ouvre à d’autres langues que l’anglais, par la traduction, puis par la création de jeux non-anglophones. Mais c’est aussi le début des grandes campagnes de dénigrement aux États-Unis, avec en 1979 le début de l’affaire James Dallas Egbert.
– le temps des mutations couvrirait en gros les années ’90, qui connurent à la fois une époque pléthorique (à leur début, dans la droite ligne de l’Âge d’Or), et des chamboulements, les plus importants étant liés à l’avènement de Vampire: The Masquerade et du World of Darkness (à partir de 1991), à l’arrivée des cartojeux, Magic: The Gathering en tête, qui s’accompagna d’un recul du JdR (à partir de 1993), puis, à la fin de la décennie, au développement d’internet et au début du phénomène vintage (les ressorties ou rééditions de JdR épuisés depuis belle lurette, datant des deux premières époques).
– enfin, et en attendant une future cinquième période, l’âge de l’information, ou de la surabondance, correspondant en gros à la décennie 2000, et marqué : par l’explosion d’internet (avec l’apparition d’ouvrages professionnels uniquement vendus sous forme informatique, la quasi-disparition du fanzinat papier au profit des sites internet, et la mise en circulation importante de vieilleries, soit via des sites de vente genre Ebay, soit, après numérisation, par le peer-to-peer ou d’autres moyens d’échanges) ; par l’arrivée d’un standard de JdR, non universellement accepté certes, mais qui a connu une hégémonie jamais vue auparavant, le D20 System (à partir de 2000) ; et (au moins dans les premières années de la décennie), par un fort développement du vintage évoqué précédemment.
Voilà donc comment je structurerais une histoire du JdR, si j’avais à en écrire une aujourd’hui.
En sachant que je serais dans l’incapacité de rédiger quelque chose de correct pour la quatrième époque : je ne suis plus dans le coup !
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