Compte-rendu d’une partie de Traveller.
Nous sommes en 1106. Après avoir passé plusieurs mois à participer aux opérations de piraterie et de commerce interstellaire de la colonie de Gurzhvoursivazae, sous l’autorité de Dazen Ganaran, le chef des corsaires locaux, Géraldine Martin, Légé Mc Gregor et Robert Moore, ancien équipage de Recherches de Rachel fourvoyé dans les Étendues vargr suite à un incident de saut, décident de tenter de regagner Triade (Gvurrdon / Uthe 2436), d’où ils espèrent pouvoir rejoindre l’Imperium.
Pour circuler de façon moins repérable en territoire vargr, ils ont décidé de dissimuler Recherches de Rachel dans la soute du Graouali, un vraquier dont ils se sont emparés sur le spatioport d’Aellaesgvarzath, et qu’ils ont en quelque sorte « racheté » aux Gurzhvoursivazais par leur participation active aux raids de piraterie. En outre, Robert et Géraldine sont désormais capables de comprendre et de parler couramment le gvegh, et devraient donc être en mesure de donner le change pour les communications radio.
Après avoir hâlé leur appareil dans la gigantesque soute et l’avoir solidement amarré pour éviter qu’il ne puisse y bouger (avec pour conséquence qu’il ne sera pas possible de l’en sortir rapidement si besoin était), fait des stocks de conserves leur permettant de tenir au moins trois mois, et rassemblé toutes les données concernant Gvurrdon disponibles sur place, les aventuriers font leurs adieux aux Gurzhvoursivazais (aucun n’ayant accepté leur offre de les accompagner vers l’Imperium : la colonie étant implantée ici depuis plus de deux millénaires, n’a aucun lien là-bas, et de plus, chacun s’accorde à trouver leur périple extrêmement dangereux et à ne leur accorder aucune chance de réussite. Légé vérifie toutefois que le jeune Gani Irkirkhaamn, le fils du garagiste, n’est pas monté à bord discrètement.
Nos héros débattent de l’intérêt de se livrer à un peu de commerce sur le trajet, par exemple en transportant du courrier, afin de gagner un peu d’argent. Mais cela les amènerait à se montrer eux-mêmes et risquerait donc d’éventer leur couverture, et ils préfèrent finalement renoncer à cette idée.
Leur premier saut les amène à Kueng (Gvurrdon / Ksits Usathu 2229), système peu peuplé avec lequel Gurzhvoursivazae entretient quelques relations commerciales. Ils y ravitaillent sans encombre puis sautent vers Gaelaeth (Gvurrdon / Ksits Usathu 2329), où ils s’étaient livrés à de la piraterie avec les Gurzhvoursivazais. Tandis qu’ils écument l’atmosphère de l’une des quatre géantes gazeuses du système, Robert a l’oreille attirée par une communication radio en gvegh dans laquelle il reconnait le mot Wobbegong, nom de la classe de vaisseaux dont fait partie Recherches de Rachel. Tentant de suivre cet échange entre deux appareils vargr, il pense en comprendre l’essentiel malgré la vitesse d’élocution des deux interlocuteurs : l’un informe l’autre qu’un vaisseau de classe Wobbegong, venant de l’Imperium et avec à son bord trois humains (dont les descriptions correspondent à la sienne et à celles de ses deux compagnons), est recherché avec son contenu intact par une grande puissance politique, avec une forte prime à la clé ; ce vaisseau a été repéré pour la dernière fois dans le système de Vaernsgurr, et pourrait avoir trouvé refuge à Gurzhvoursivazae.
Le Graouali saute ensuite vers Adegokh (Gvurrdon 2530) et écume l’atmosphère de l’unique gazeuse. Alors qu’il s’en éloigne pour sauter à nouveau, Robert détecte un vaisseau, certes encore éloigné, mais qui s’approche : il s’agit d’un corsaire vargr de 400 tonneaux. Bien que le vraquier soit armé, nos amis n’en mènent pas large, d’autant qu’à chaque changement de cap de leur part, l’autre appareil corrige le sien de la même façon. Robert a une discussion radio animée avec le corsaire, s’entendant répondre que « Vas-y, l’espace il est à tout le monde ! » et « C’est bon, je veux juste m’approcher pour mieux te voir ! » (librement traduit du gvegh). Les aventuriers se préparent au pire et maintiennent leurs tourelles braquées sur l’intrus, mais après s’être dirigé vers eux pendant plusieurs heures et alors qu’il vient d’arriver à ce que Robert considère comme une portée raisonnable de tir, il vire brusquement de bord et s’éloigne. Nos amis ne demandent pas leur reste et sautent dès que possible vers leur prochaine étape.
À Thurruegvudhotue (Gvurrdon / Firgr 2731), le Graouali est pris dans des turbulences alors qu’il est en train d’écumer l’atmosphère de l’une des géantes gazeuses ; malgré d’inquiétants craquements de la structure du vraquier, celui-ci tient le coup. En s’éloignant pour sauter à nouveau, Robert remarque que la pression atmosphérique à bord diminue légèrement : il y a visiblement une fuite d’air, et à ce rythme, il faudra une centaine d’heures pour que le vaisseau s’en vide complètement. Les aventuriers isolent les différents compartiments de l’appareil, ce qui permet à Légé de constater qu’il y a une longue fissure de la coque sur bâbord-arrière, s’étendant sur presque toute la hauteur du Graouali, et que la structure du vraquier a été fragilisée, ce qui nécessite des réparations assez longues réalisées dans des installations lourdes type cale sèche d’un chantier spationaval. À défaut, il devrait être possible de faire des réparations qui devraient tenir à condition de poser le vaisseau sur une surface stable et si possible plane, afin de limiter les risques de gauchissement. Robert met le cap sur Thurruegvudhotue et, après un examen de la planète océane depuis l’orbite (qui permet à nos amis de constater la présence sur le spatioport local d’une demi-douzaine de vaisseaux marchands et d’un corsaire), choisissent de se poser sur un îlot de quelques milliers de mètres carrés, situé à peu près aux antipodes de l’archipel où se concentre la population locale. Effarouchant des oiseaux aptères ressemblant à des poules presque rondes et faisant s’envoler une colonie d’animaux rappelant les chauves-souris, le Graouali se pose sur une zone à peu près plane en écrasant les broussailles, et Légé se met aussitôt à l’ouvrage, pendant que la marée monte sous l’action des deux petites lunes de la planète.
Les réparations lui prennent presque une journée entière, et dès qu’il est à peu près satisfait de son travail, les aventuriers, ne maintenant une atmosphère interne que dans la partie tribord du pont supérieur, celle qui comprend le poste de pilotage, et décidant d’utiliser à nouveau leurs cabines à bord de Recherches de Rachel, reprennent l’espace et sautent vers l’étape suivante, la dernière au sujet de laquelle les Gurzhvoursivazais avaient été en mesure de leur fournir quelques informations : Oegaeldu (Gvurrdon / Firgr 2832), l’un des mondes du Kedzudh Aeng (Union de Kedzudh), un État interstellaire vargr qui s’est constitué il y a une soixantaine d’années pour lutter contre la piraterie.
Pendant que les aventuriers ravitaillent en écumant l’atmosphère de l’une des deux gazeuses d’Oegaeldu, ils détectent un vaisseau se dirigeant vers eux. Faisant le point avec les senseurs, Robert reconnait un appareil militaire zhodani de 600 tonneaux, un escorteur visiblement beaucoup plus lourdement armé que le Graouali, et se déplaçant également beaucoup plus vite : s’il est animé d’intentions belliqueuses à leur égard, il ne leur sera pas possible de lui échapper.
Géraldine s’installe dans la tourelle laser centrale et Légé prend le contrôle d’une autre tourelle depuis le poste de pilotage, tandis que Robert fonce désespérément au plus loin de la géante gazeuse pour pouvoir sauter dès que possible. Un écho se détache soudain du vaisseau zhodani : nos amis craignent d’abord qu’il ne s’agisse d’un missile, mais c’est un chasseur embarqué qui se contente de s’approcher d’eux avant de revenir à l’escorteur. Celui-ci finit par arriver à (relative) proximité du vraquier, et tire dans sa direction un missile que Légé parvient à détruire d’un tir de laser. Robert riposte aussitôt en tirant une salve avec le lance-missiles tritube du Graouali, puis lance un appel à l’aide en gvegh, annonçant qu’un appareil militaire zhodani est en train de l’agresser. Mais malgré une défense héroïque et plusieurs coups au but, les aventuriers finissent par se laisser aborder. Le vaisseau ennemi s’approche juste au dessus du vraquier, puis un Zhodani en armure spatiale se matérialise soudain dans le poste de pilotage et tient Légé et Robert en respect pendant qu’un commando franchit l’espace entre les deux appareils et pénètre par le sas principal, ouvert par Robert. Ne parlant pas entre eux (ces fourbes psioniques employant assurément la télépathie), les assaillants menottent nos amis sur leurs sièges et maîtrisent Géraldine (qui n’oppose pas non plus de résistance) dans sa tourelle. Puis celui qui s’est téléporté au début et semble être le chef assure aux trois prisonniers qu’ils n’en ont pas après eux, et leur demande où se trouvent les missiles. Après une tentative pour jouer au plus fin, Robert indique la cachette des deux missiles récupérés dans l’épave du Deutsche Post, et une partie du commando quitte le poste de pilotage. Robert tente d’en savoir plus sur ce que sont ces fameux missiles qui attirent tant de convoitises, et le chef zhodani, laconique, réplique qu’il s’agit de prototypes impériaux (ce qui surprend ses interlocuteurs, en raison des marquages zhodani visibles sous la peinture ; mais ils ne font aucun commentaire). Légé et Robert proposent de faire défection et de rejoindre le Consulat, mais leur proposition ne suscite aucune réponse. Un moment plus tard, les Zhodani détachent nos amis (après leur avoir déconseillé de tenter quoi que ce soit), et quittent le vraquier comme ils étaient venus (le chef se téléportant en dernier).
Tandis que le vaisseau zhodani s’éloigne, Légé et Géraldine font le tour du vraquier et de sa cargaison. À bord de Recherches de Rachel, seuls les deux missiles ont été extraits à la hâte de leurs cachettes et emportés ; par contre, les moteurs directionnels et de saut du Graouali ont été endommagés. Les dégâts sont importants mais réparables, mais il faudra du temps. Robert quant à lui a observé le départ de l’escorteur et se déclare persuadé que l’appareil ennemi, lui aussi endommagé, n’est plus en état de sauter.
Légé s’attelle rapidement aux réparations des moteurs directionnels, afin de permettre au vraquier de quitter les alentours de la gazeuse, car l’appel à l’aide lancé par Robert a manifestement eu un fort écho : les canaux radio bruissent de discussions sur cette inadmissible intrusion zhodanie dans l’espace du Kedzudh Aeng, et il est manifeste qu’un grand nombre de vaisseaux présents dans le système se rendent sur les lieux de la bataille pour tenter de faire la peau à l’intrus et piller l’épave du vaincu.
S’éloignant aussi rapidement et aussi discrètement que possible de la planète, et tandis que Légé s’attelle aux réparations du moteur de saut, Géraldine et Robert observent à distance sur leurs senseurs la meute se lançant à la poursuite de l’escorteur zhodani, qui manœuvre visiblement moins bien qu’auparavant, puis la curée. Les avaries réparées (à l’exception de brèches à la poupe, irréparables avec les pièces qui peuvent être cannibalisées à bord du vraquier et qui empêchent de pressuriser le Graouali ailleurs que dans la partie tribord du pont supérieur), les aventuriers attendent patiemment plusieurs jours que les choses se soient visiblement tassées, puis mettent le cap sur l’épave zhodanie, espérant y retrouver les deux missiles ; en effet, ceux-ci étant d’un calibre inhabituel, n’auront peut-être pas été emportés par les assaillants.
Malheureusement, l’épave a été littéralement désossée : tout ce qui était démontable et pas trop endommagé a été embarqué par les pillards, et même les cadavres n’ont plus sur eux que des lambeaux de sous-vêtements. Légé examine de près la physionomie des Zhodani, et a la surprise de constater qu’ils sont parfaitement humains : pas d’oreilles pointues, de couleur de peau inhabituelle, de boîte crânienne hypertrophiée ou d’autre signe distinctif, si ce n’est une tendance à être de taille supérieure à la moyenne impériale, avec une corpulence plutôt svelte.
Dépités de ne pas avoir retrouvé leurs fameux missiles, Légé et Robert décident de récupérer des plaques pour colmater les brèches dans la coque du Graouali, mais ils abandonnent immédiatement cette tâche lorsqu’ils remarquent que le youyou d’une dizaine de tonneaux qui se trouvait à bord de l’escorteur a apparemment été largué en urgence, les charges explosives qui en libéraient les amarres ayant détoné.
Contrairement aux débris des deux chasseurs embarqués, les restes du youyou ne dérivent pas à proximité du champ de bataille. Nos amis finissent par en retrouver la trace : il se dirige aussi discrètement que possible vers la deuxième géante gazeuse du système. Ils se lancent à sa poursuite, animés par l’espoir que les précieux missiles se trouvent à bord.
Le pilote de l’embarcation a manifestement l’intention de la dissimuler au sein des débris de l’anneau qui entoure la géante, mais Robert, survolant l’anneau, parvient à le repérer, et Légé, prenant tout son temps pour ajuster son tir, perfore la verrière du poste de pilotage au moyen de l’un des lasers du vraquier. Puis les aventuriers, se maintenant à une distance d’une dizaine de kilomètres qu’ils espèrent suffisante pour que les occupants du youyou ne puissent pas se téléporter à leur bord (et ayant tendu un réseau de filins en travers de leur passerelle pour gêner toute matérialisation intempestive), patientent trois jours, comptant sur la fatigue des rescapés pour les affaiblir avant qu’ils ne se décident à s’approcher de leur esquif à bord de leur aéromobile.
Laissant le Graouali à distance avec Géraldine à bord, Robert amène l’aéro à l’aplomb du youyou et fait descendre Légé suspendu à un filin de 35 mètres. Arrivé au niveau de la verrière, celui-ci constate que le faisceau du laser, en perforant l’appareil, a également traversé de part en part le corps du pilote. Rien ne semble bouger à bord, et contrairement à ce à quoi il s’attendait, la partie arrière est grande ouverte sur le poste de pilotage. Explorant rapidement l’épave, il constate que le pilote était seul à bord, et que les deux missiles sont à l’arrière. Nos amis n’ont donc plus qu’à les charger à bord de leur aéromobile pour les ramener dans leurs cachettes à bord de Recherches de Rachel. Ils récupèrent les papiers du Zhodani ainsi que des documents trouvés dans la « boîte à gants » de l’appareil, et le pistolet du mort, ayant partiellement fondu suite au tir de laser, et embarquent jusqu’à l’épave du youyou elle-même, qu’ils amarrent dans le peu de place qui reste dans la soute du vraquier.
Les aventuriers peuvent enfin reprendre leur périple et mettre le cap sur leur prochaine étape. Après avoir discuté de l’opportunité de se diriger vers Gvutson (Gvurrdon / Firgr 3233) et sa base du SIEI (dont Géraldine et Légé sont réservistes) pour y demander du secours, ils décident de continuer leur route vers Triade et sautent donc vers le système Gvurrdon / Firgr 2834, dont ils ignorent tout (au-delà de la présence d’eau libre, et d’au moins une géante gazeuse).