(j’avais prévu il y a plusieurs mois de préparer le présent billet quelques jours à l’avance, histoire de n’avoir plus qu’à le poster tranquillement une fois la date venue ; chose que je n’ai malheureusement pas pu faire. J’avais aussi prévu de le consacrer à un autre JdR, JdR qui a eu deux « actualités » ce mois-ci, raison pour laquelle j’ai préféré changer mon fusil d’épaule pour en parler peut-être une autre fois, après m’être procuré ces nouveautés inattendues. Bref, tout ça pour vous dire, au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, que je suis carrément à la bourre pour mon « évènement » annuel, qui si ça se trouve ne sera posté que le premier juin, le temps que je rédige le présent billet (j’ai déjà perdu un temps phénoménal à essayer de trouver en ligne des images potables des couvertures))
Or donc, le JdR de SF injustement méconnu qui a droit à son coup de projecteur cette année est FTL: 2448 ; un JdR tellement méconnu qu’il ne figurait dans le panorama des JdR réalisé par Philippe Sallerin pour Chroniques d’Outre Monde n° 6 (mars avril 1987) que sous un titre erroné (FTL 2048), et qu’on le retrouvait dans l’additif au panorama signé Patrice Mermoud paru dans le numéro suivant (n° 7, mai juin 1987) sous un autre nom, là encore erroné (FTK 2448) : autant dire que ça n’a pas facilité sa découverte par les amateurs de JdR obscurs parlant la langue de Guiserix. D’ailleurs, il était passé complètement sous mon radar à l’époque, et ce n’est qu’en 1990, en le voyant mentionné au même titre que Traveller parmi les inspirations de la deuxième édition de l’excellent GURPS Space (il l’était aussi dans la première édition (de 1988) et le fut à nouveau dans la troisième (1999), avant de disparaître dans la quatrième (2006)), que je m’y étais intéressé.
Je ne connais pas la première édition de ce JdR de space opera signé Richard Tucholka, publiée par Tri Tac Systems en 1982. Elle se présentait sous la forme d’un livret à reliure spirale.Il y aurait eu une deuxième édition en 1985, puis une troisième en 1990, éditions dont j’ignore tout mais dont je présume qu’elles étaient très proches de la première, peut-être même de simples réimpressions. L’édition que je possède, celle de 1993 (sous-titrée Space Adventure in the 25th Century), est donc la quatrième (ce qui n’est pas précisé dans les bouquins). Elle se présente sous la forme de deux manuels de près de 200 pages chacun, dont les premières de couverture sont les deux moitiés d’une même image. Bien entendu, il est nécessaire d’avoir les deux bouquins pour pouvoir jouer…
Le Book 1 contient l’essentiel des règles du jeu et une partie du contexte.
On y trouve la création de persos (avec tout un éventail d’espèces jouables : diverses variétés humaines, des animaux élevés à la conscience (grands singes, Cétacés) ou issus du génie génétique, et une palanquée d’ET en tous genres), le matos, les pouvoirs psioniques, l’essentiel du système de règles (le système habituel de chez Tri Tac), et perdues à travers tout ça, des infos de contexte : grandes lignes du contexte et infos sur le système judiciaire.
L’action se passe comme vous vous en doutiez en 2448. Après des troubles économiques, des guerres et des épidémies dans les années ’90 / 2000, l’humanité s’est progressivement unie sous l’égide de l’ICO (International Corporate Organization), a quitté la Terre, conquis le système solaire, colonisé d’autres systèmes stellaires, rencontré des ET amicaux (à commencer par les Bor’Cha, ursoïdes), et créé avec eux l’ISCO (Interstellar Co-Operative of worlds), avec sa police, sa justice et ses forces armées (toutes dépendant de l’ICL (Interstellar Court of Law). Mais il y a aussi eu divers problèmes, d’abord avec les robots (androïdes) lorsqu’ils ont appris à tuer (et qu’il a donc fallu les traquer et les éliminer), ensuite avec d’autres espèces ET, hostiles et belliqueuses. Bref, c’est assez classique.
Le Book 2 a un contenu plus hétéroclite.
Il contient les règles sur les spatioports, le commerce interstellaire, la création de systèmes stellaires, de mondes et de créatures extra-terrestres (animaux et êtres pensants), une liste de mondes, les règles sur les vaisseaux spatiaux (voyages, pannes, combats, construction, etc… ; avec en particulier la présentation et les caracs d’un éventail allant des premiers voyages interstellaires jusqu’au vingt-cinquième siècle).
Toute une section traite de la police et du crime : intitulée Cops 2448, elle reprend je présume le contenu du supplément éponyme pour les précédentes éditions du jeu, paru en 1985 et que je ne connais que de nom. Très planétaire (pour ne pas dire terrienne), elle fait un peu décalée (et assurément inhabituelle) dans un bouquin de base de JdR de space opera, mais ce n’est pas une idée incongrue (j’avais d’ailleurs fait le même genre de choses pour mon propre JdR de space opera maison, sans rien connaître à l’époque de Cops 2448). Cette section contient en particulier deux scénarios : je ne les ai pas relus pour vous en parler plus en détails, mais j’avais noté qu’ils étaient plus exploitables dans un cadre cyberpunk que dans du space opera.
D’autres sections, plus habituelles dans un JdR de space opera, traitent des forces armées spatiales, des colons mettant en valeur une nouvelle planète, et des pirates de l’espace.
EMR 2448, sur la médecine (et plus particulièrement sur l’EMR Corps, qui sillonne la Frontière pour prodiguer secours et soins à ses habitants), est un peu moins habituelle.
Il y a encore des infos sur les ET hostiles (leur société, les espions que l’ISCO envoie chez eux, etc…) ; et un scénario permettant de lancer une campagne de space opera (que je n’ai pas relu non plus, faute de temps ce soir).
Bref, FTL: 2448 est un JdR avec un contenu dense, complet, et plus varié que ce qu’on trouve dans la plupart des JdR de space opera (et même, dans la plupart des gammes de JdR de space opera) ; et avec un traitement du thème qui ne se limite pas, beaucoup s’en faut, au classique groupe d’aventuriers errant de monde en monde à bord d’un petit vaisseau spatial.
Revers de la médaille, les règles sont denses et la présentation des infos, éparpillées dans deux manuels différents, n’est pas toujours très claire (la table des matières n’est pas non plus un modèle du genre, ce qui n’aide pas forcément à s’y retrouver, même si elle est dans le fond assez détaillée).
Et bien entendu, à part deux suppléments dont le contenu a été intégré au Book 2, le jeu n’a malheureusement eu aucun suivi.
Un JdR riche qui mérite donc qu’on s’y intéresse, au moins pour y cannibaliser des idées. Sa mention dans GURPS Space, ouvrage qui est lui-même une référence en matière de JdR de space opera, était pleinement justifiée.
Merci pour ce long portrait.
Je l’avais complètement négligé aussi parce que les jeux de TriTac (j’ai Fringeworthy du même Tucholka, mort l’an dernier) ont souvent un système assez pénible.
Pénible, je ne sais pas (je n’ai fait que le lire). Je dirais plutôt qu’il est daté « années ’80 ». Mais je suis à peu près persuadé qu’à l’époque, j’aurais pu l’employer sans difficulté.