Je suis actuellement plongé dans la lecture de l’excellente campagne The Traveller Adventure. Et comme trop souvent, je suis frappé par le fait que l’implication des PJ dans l’histoire tient à un fil que tout individu normalement constitué refuserait de suivre.
Ici, il s’agit de ramasser dans la rue un inconnu blessé (au lieu de prévenir les secours ou de le conduire à l’hôpital), de le cacher, de commettre un cambriolage pour ses beaux yeux, de l’exfiltrer de la planète, et de continuer à voyager avec lui… Et honnêtement, si vos joueurs laissent leurs persos se conduire ainsi, soit ils sont vraiment très coopératifs et le font car en tant que joueurs ils savent que c’est indispensable au démarrage de la campagne, soit ils sont vraiment très couillons et naïfs.
Vous me direz peut-être que ça tient à l’âge du scénario (et encore… 1983, ce n’est certes plus tout jeune, mais on savait déjà à l’époque s’intéresser à la cohérence des scénars et des contextes, j’en veux pour preuve le reste de la campagne en question). Mais c’est un problème qu’on retrouve jusque dans des productions récentes, puisque j’avais émis le même genre de critiques au sujet de la campagne Tripwire parue l’année dernière pour Rikki-Tikki-Traveller.
Alors d’accord, une fois le problème cerné, le MJ peut, en se creusant un peu les méninges, le régler au prix de modifications mineures. Mais c’est quand même un monde que ce soit à lui de faire ça, alors que le scénariste aurait pu (et dû) lui-même s’en charger…
Voilà en tous cas encore un point sur lequel les jeux « à mission » ont un avantage sur les autres : car du moment que la hiérarchie des persos leur dit ce qu’ils doivent faire, la question de leur implication ne se pose en principe plus.
Là, je suis très jaloux parce que je rêve de cette campagne depuis longtemps (et hélas, elle n’est pas encore dans les nombreux pdf GDW sur Divethru.rpg).
Un problème des motivations dans les aventures Traveller est aussi une contradiction entre le côté amoral/cynique présupposé (ce sont, par défaut, des mercenaires intéressés surtout par l’argent) et certaines ficelles qui supposent un peu d’altruisme. Certes, on sait bien que des Han Solo ou des Macolm Reynolds « cachent des coeurs d’or, blabla » et tout ça.
Le *.pdf figure sur le CD-ROM Classic Traveller vendu sur cette page (note bien que je n’ai pas acheté de CD-ROM auprès de FFE, je te signale juste l’info).
Sinon, dans le cas présent ce n’est plus un cas de cynique matérialiste au grand cœur, c’est carrément de la bêtise crasse (ramener un blessé chez soi pour le soigner, alors qu’il pourrait être pris en charge par le corps médical ? ? ?) associée à de la crédulité profonde (se lancer dans un cambriolage pour le compte de quelqu’un qu’on ne connait pas, qu’on vient tout juste de rencontrer, et qui n’a rien à offrir en échange ?).
Si encore ils avaient utilisé le classique « c’est un ancien copain que vous venez de retrouver », j’aurais trouvé l’artifice éculé, mais il aurait au moins eu le mérite de pouvoir fonctionner (d’ailleurs, si je fais jouer un jour cette campagne et si je n’ai pas de meilleure idée d’ici là, c’est sans doute ce sur quoi je me rabattrai).
Ca y est, je viens d’en avoir un exemplaire sous les yeux.
Il y a quand même l’option que le PNJ agressé en question (c’est bien Gvoudzon ?) soit un PJ, ce qui peut changer la donne.
Mais en effet, il faudrait vraiment qu’ils soient convaincus que les autorités locales de Leedor sont dangereuses pour le personnage (ce qui peut être plus facile si les PJ ont eux-mêmes des choses à cacher).
PJ ou PNJ, c’est quand même le même problème : dans la vie, les gens ne se baladent pas avec une pancarte « je suis un PJ » autour du cou, qui leur attirerait systématiquement la sympathie et la coopération des autres PJ. Le problème de l’associer au reste du groupe reste entier.
Et à côté de ça, c’est quand même un perso « typé », donc il faut 1°) que le MJ soit disposé à laisser un joueur incarner un PJ de ce genre, 2°) qu’un joueur soit disposé à le faire et 3°) que ce joueur ait les connaissances « de contexte » nécessaires (ce qui, quand on n’a pas eu un accès direct aux sources mais qu’on les a assimilées au fil de diverses parties et de façon parfois volontairement biaisée par le MJ, pour refléter certains préjugés par exemple, demande une certaine préparation).
Bref, c’est effectivement une solution, mais ce n’est pas forcément la meilleure. :-\
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