Remède de cheval

Je croyais que la proposition faite il y a quelques jours par Françoise Tenenbaum, de pallier à la pénurie de médecins de campagne en sollicitant les vétérinaires ruraux, était une provocation pince-sans-rire destinée à faire réagir, un peu comme les récents propos de Yannick Noah où il appelait à la légalisation du dopage sans en penser un mot ; mais pour certains, elle était tout ce qu’il y a de plus sérieuse.
Alors si jamais c’était une proposition sérieuse (ce dont je doute encore), il va sans dire que non, ce n’est pas sérieusement envisageable (et d’autant moins dans une société de plus en plus procédurière comme la nôtre). Quand on connait les différences anatomiques et physiologiques qui existent entre un bovin, un canasson et un klebs, pour ne citer que ces trois espèces, et ce que ça implique sur le plan médical et chirurgical, on se doute sans peine qu’il y en a au moins autant avec un humain. Et que se lancer dans de l’improvisation médicale sur une espèce sur laquelle on ne connait que peu de choses de par sa formation professionnelle (même en partant du principe qu’il y aurait, comme Mme Tenenbaum l’a proposé, une passerelle de formation), c’est acceptable dans un cadre de médecine de catastrophe (c’est d’ailleurs un grand classique de mes contextes post-cata en JdR, entre autres), mais vus les risques que ça implique pour le patient, c’est du n’importe quoi dans un pays moderne avec des services de secours d’urgence couvrant tout le territoire et des infrastructures hospitalières développées, comme c’est encore le cas de la France.
Pourquoi pas aussi proposer aux toubibs d’aller au cul des vaches dans les endroits où les vétos ruraux partant en retraite ne trouvent pas eux non plus de successeurs ? Pour parodier Mme Tenenbaum, « Vous allez me dire que c’est du sous-art vétérinaire, mais en milieu rural je suis sûr que ce serait bien accepté par les populations ». Ou pas.
Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas un certain nombre d’actes médicaux d’humaine pour lesquels un vétérinaire serait parfaitement compétent. Mais c’est aussi le cas des infirmiers, et si franchement on devait développer dans nos pays modernes une médecine à deux vitesses selon qu’on vit en ville ou à la campagne, c’est vers cette profession qu’il me semblerait logique de se tourner.
Mais le plus sage reste quand même de chercher des solutions permettant de respecter le vieil adage qui dit à peu de choses près : À chacun son métier, et les vaches seront bien soignées.

Ce contenu a été publié dans On n'a pas des métiers faciles, Qu'est ce qu'on va devenir ?, avec comme mot(s)-clé(s) , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Une réponse à Remède de cheval

  1. Vaken dit :

    Je trouvais bizarre que tu n’avais encore rien posté à ce sujet.
    J’ai vu (par hasard, vu que je ne regarde pas la télé non plus) une interview de la dame il y a quelques jours, et elle m’avait l’air tout à fait sérieuse.
    On y voyait aussi un vétérinaire indiquant que dans sa profession, ils étaient tout aussi débordés, « pour peu qu’on ignore l’écueil principal qui est qu’on n’a pas les compétences », avait-il ajouté. Et il avait conclu, rigolard, « et puis on n’a pas les mêmes outils » en sortant son bras du derrière d’une vache.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *