Scénario dans la Grèce de la mythologie.
Si vous êtes censés participer à ce scénario en tant que joueurs, ne lisez pas plus loin…
Les personnages sont des héros (au sens mythologique du terme ; des humains accomplissant des hauts faits, parfois avec une aide divine ou surnaturelle). Ils se trouvent dans une petite ville portuaire de Grèce continentale, ville dont ils sont peut-être originaires. C’est le printemps.
Je crains les Minoens, même porteurs de cadeaux
Un navire crétois fait escale au port. Il a à son bord un autre héros mythologique, Polydore le Crétois, qui bénéficie déjà d’une petite réputation pour avoir accompli quelques prestigieux hauts faits, mais que les personnages n’ont jamais rencontré. Il s’avère être un homme arrogant et brutal, se complaisant dans l’humiliation des plus faibles que lui. Il débarque en ville pour la durée de l’escale et s’en prend en particulier à certains proches des persos (famille proche, amis, amant(e)s ou objets de désir n’étant pas encore devenus des amant(e)s). Témoins de ses agissements ou en ayant pris connaissance de la bouche de victimes espérant être vengées, les héros vont probablement vouloir se faire un plaisir de corriger l’impudent, ce qui se fera juste avant qu’il n’embarque à bord du navire qui reprend la mer. Mais leur adversaire se jouera aisément de leurs attaques, les ridiculisant éventuellement, et leur annoncera finalement, depuis l’embarcation qui commence à s’éloigner du quai, que leurs tentatives étaient vouées à l’échec car il bénéficie (comme ils ont pu le constater) d’une protection magique qui le rend invulnérable (cette protection lui a été conférée par un dieu ou une créature puissante, dont l’identité sera à définir en fonction de la campagne dans laquelle ce scénario est joué).
Humiliés dans leur ville et devant leurs proches, les héros devraient n’avoir qu’une envie : se venger de Polydore. Pour cela, il leur faut tout d’abord découvrir le secret de l’invulnérabilité du Crétois. Personne en ville ne pouvant les renseigner sur ce sujet, ils vont devoir consulter un oracle.
À cette époque de l’âge mythique où vivent nos héros, l’oracle le plus proche est dit-on situé dans un bosquet de Thrace. Se rendre là-bas représente un long voyage par voie de terre, et les personnages n’ont pas de navire. Mais un charpentier naval s’est récemment établi dans un proche village, et s’ils le lui demandent, il peut leur fournir une embarcation de sa fabrication, leur permettant de faire le voyage par mer, donc plus vite et en se fatigant moins.
Oracle au désespoir
Le bosquet de l’oracle est situé au sommet d’une colline escarpée, bien visible depuis la côte et au centre duquel se dresse un imposant chêne dont l’une des branches maîtresses porte un feuillage d’un rouge vineux (malgré la saison), qui le rend facilement identifiable.
Dans le bosquet, les personnages finiront par rencontrer une dryade, Velanéa, avec une grande mèche rouge dans les cheveux (elle est liée au chêne). Elle semble courroucée de leur intrusion dans son espace vital, et leur demande d’un ton menaçant ce qu’ils viennent faire là. Si les héros ne sont pas agressifs et lui annoncent qu’ils sont à la recherche de l’oracle, Velanéa leur déclarera qu’elle peut leur permettre de le rencontrer, à condition qu’ils accomplissent au préalable un travail pour elle : des bergers viennent faire paître leurs chèvres de plus en plus près de son bosquet, et les animaux s’enhardissent de plus en plus à dévorer buissons et jeunes rameaux et à arracher l’écorce des arbres, rognant petit à petit le bosquet (et mettant à terme la vie même de la dryade en danger, mais elle ne leur révélera pas ce point). Elle demande donc aux personnages d’écarter cette menace pour la végétation des lieux, en persuadant les bergers d’éloigner leur troupeau.
La tâche sera moins facile qu’il n’y parait, car dans ses explications, Velanéa a omis deux détails : les chèvres sont grandes comme des chevaux, vicieuses et agressives (et le bouc encore plus) ; quant aux bergers, ce sont deux cyclopes (qui à l’occasion ne dédaignent pas de remplacer à leur menu un chevreau par un humain). Les héros devront les convaincre, les leurrer, les effrayer, ou les tuer (eux ou leurs bêtes). Une idée qui ne fonctionnera probablement pas sera de leur offrir des richesses pour qu’ils éloignent leur troupeau du bosquet : les cyclopes, cupides, penseront que si les personnages leur font un tel présent, ils sont en mesure de leur donner encore plus, et continueront à exiger un tribut de leur part pour maintenir leurs chèvres loin du bosquet (sans pour autant avoir l’intention de respecter finalement leur part du marché). Par contre, les envoyer à la recherche d’un hypothétique trésor enfoui quelque part pourrait marcher, au moins temporairement…
Bien entendu, Velanéa ne se contentera pas d’un éloignement de courte durée de la menace (étant l’oracle, elle saura automatiquement quel accord les personnages ont conclu avec les cyclopes).
Les héros pourraient éventuellement avoir l’idée d’ériger autour du bosquet une clôture empêchant l’accès des chèvres. Dans ce cas, la dryade exigera que les animaux sauvages puissent continuer à accéder librement au lieu, une condition qui sera certainement bien difficile à remplir.
Une fois le problème des chèvres résolu, Velanéa révélera aux personnages qu’elle est elle-même l’oracle qu’ils sont venus consulter. S’ils l’interrogent à ce sujet, elle leur dévoilera comment priver Polydore de son invulnérabilité : il faut lui faire boire quarante gouttes du sang de Chérophios, une créature monstrueuse avec une tête de sanglier, le torse d’un homme et une queue de serpent, vivant au fond d’une caverne située au flanc du mont Kedros (montagne conique de Crète culminant à 1.777 m et située à une cinquantaine de kilomètres à l’est-sud-est de Cnossos à vol d’oiseau). Cela lui conférera alors la force d’un vieillard et la sensibilité à la douleur d’un jeune enfant.
Le mythe de la caverne
L’intérieur de l’île de Crète est en grande partie sauvage, couvert de forêts et peuplé de créatures mythologiques telles que centaures et satyres qui ne verront pas forcément d’un bon œil l’intrusion des personnages sur leur territoire. L’emplacement approximatif de l’entrée de la caverne de Chérophios pourra être indiqué aux héros par des autochtones (humains, centaures, satyres ou autres), mais il leur faudra fouiller un moment les pentes broussailleuses du Kedros pour la découvrir. De nombreux ossements (certains humains) jonchent le sol alentour. La caverne est profonde et bien entendu plongée dans l’obscurité. Chérophios voit dans le noir, et il repérera probablement les personnages avec leurs torches bien avant que ceux-ci ne détectent sa présence.
Chérophios est une créature malfaisante et anthropophage, et bien rares sont ceux qui sont ressortis vivants de son antre. En cas de combat, ce sera un adversaire coriace, dont la peau épaisse ne pourra être percée que par les meilleures lames. Ses défenses peuvent éventrer un homme, et ses deux bras lui permettent d’utiliser des armes (javelots et épée). Sa taille l’empêchera cependant d’accéder à certaines fissures où les personnages pourraient se réfugier si l’affrontement tourne à leur désavantage.
Le combat n’est cependant pas la seule solution possible pour récolter quarante gouttes de sang du monstre : ce dernier pourrait accepter de les donner aux personnages par une simple coupure, en échange d’autre chose. Étant anthropophage, la première contrepartie qu’il proposera sera qu’on lui laisse dévorer le héros le plus dodu… Une fois un terrain d’entente trouvé et les personnages en possession des précieuses gouttes, rien ne dit que Chérophios les laissera sortir vivants de son antre : ils devront peut-être se frayer un chemin les armes à la main.
Le temps de retrouver Polydore, le sang de Chérophios aura coagulé. Or l’oracle avait parlé de lui faire boire les gouttes, ce qui pourrait amener les héros à chercher un moyen de les rendre à nouveau liquide. En réalité, l’important est de les faire absorber par le Crétois : qu’elles soient liquides ou non n’a aucune influence. De même, la quantité à administrer n’est pas précise : quarante gouttes représentent un minimum, mais s’il y en a un peu plus, ce n’est pas grave. Mais bien entendu, les personnages ignorent tout ceci…
Timeo Danaos et dona ferentes
Les héros vont donc devoir retrouver Polydore (ce qui peut les conduire à effectuer un long périple sur ses traces) et réussir à lui faire consommer un aliment ou une boisson contenant le sang de Chérophios.
À moins que leur première confrontation ait été particulièrement mémorable, Polydore ne se souviendra pas des personnages : il humilie ou affronte tant de gens sur son passage qu’il ne peut tous se les rappeler.
Lui faire absorber le sang de Chérophios devrait être assez aisé : orgueilleux comme il est, il acceptera volontiers de participer à un banquet donné en son honneur, par exemple. Une fois les quarante gouttes avalées, il faudra attendre plusieurs heures (1D6+2 par exemple) avant qu’elles ne produisent leur effet, mais les héros l’ignorent et pourraient être trop pressés de se venger et croire que leurs manigances se sont avérées inefficaces.
Une fois que le sang de Chérophios aura agi, ses effets sur Polydore seront permanents (du moins, tant qu’un dieu ou autre créature puissante ne les annule pas, lui rétablissant cette fois une force et une résistance à la douleur normales). Les héros pourront donc à loisir profiter des nouvelles faiblesses de leur ennemi pour l’humilier, voire pour le tuer s’ils sont sanguinaires (dans ce dernier cas, il est probable qu’ils encourront le courroux du dieu ou de la créature puissante ayant conféré à son protégé Polydore l’invulnérabilité magique dont il jouissait avant que les personnages ne s’en mêlent).