Innocence lost, in this holocaust, as the last King Tiger rolls on

Les cogitations qui suivent ont commencé il y a une dizaine de jours, suite à ma lecture de la gamme Tigres Volants, troisième édition, mais je n’ai pas eu le temps de les mettre au propre plus tôt, ce qui fait qu’elles sentent un peu le réchauffé (ou le refroidi, c’est selon).

Je me faisais donc la réflexion suivante : ce qui est pour moi une des grandes forces du JEU Tigres Volants est aussi une grande faiblesse pour sa GAMME (commercialement parlant) : je veux parler du fait que Tigres Volants est (et il s’en rengorge même avec raison en intro ou sur la quatrième de couverture) un jeu OUVERT, sans méta-histoire, sans méchants, et dans lequel on peut tout faire (ou presque).
Tout ça, donc, c’est pour moi un gros bon point (encore que je ne crache pas forcément sur une méta-histoire, ou au moins sur une progression chronologique du contexte, pourvu qu’elle soit intéressante et exposée au MJ dès le bouquin de base (ce qui évite de partir dans une direction pour découvrir ensuite que la gamme officielle va à l’opposé, comme c’est arrivé en 1987 à bien des utilisateurs d’un Traveller qu’on n’appelait pas encore Classic).
Mais cette ouverture a pour corollaire qu’il n’y a pas de direction préférentielle dans laquelle orienter la gamme, et que donc les suppléments peuvent partir un peu dans tous les sens, avec d’autant plus de risques de traiter d’aspects qui ne me branchent pas forcément (et encore, on a pour l’instant échappé à Fils des étoiles, que je ne manquerai pourtant pas de me procurer s’il sort un jour, en bon collectionneur que je suis, mais dont je sais déjà qu’il ne va pas franchement m’intéresser). Du coup, on se retrouve avec des suppléments abordant des sujets dépareillés, et comme il n’y a pas derrière 2dsf les moyens d’édition d’un TSR ou même d’un GDW de la grande époque du JdR, le faible volume des parutions fait que les chances de sortir un truc qui va me botter par son sujet (et, espérons le, par son traitement dudit sujet) sont d’autant plus réduites : l’éventail des sujets potentiels est vaste, le nombre de suppléments sortant minuscule, et mes centres d’intérêt ciblés, autant dire que c’est un peu une équation impossible à résoudre.
C’est la raison qui fait qu’un JdR dont le bouquin de base est enthousiasmant peut se retrouver avec une gamme relativement décevante, surtout quand on la rapporte aux espoirs nés de la lecture dudit bouquin de base.
Ce n’est pas spécifique à Tigres Volants, j’ai juste pris cet exemple parce que c’était le plus récent parmi mes lectures rôludiques (et peut-être aussi un cas frappant tendant vers l’extrême, vues l’étendue du contexte (space opera oblige), la petite taille de sa gamme, et au sein de celle-ci, la petite taille des suppléments eux-mêmes).

Je ferai pour conclure une brève comparaison avec deux autres JdR (en évitant des poids lourds comme les Forgotten Realms d’AD&D, et dans une moindre mesure l’OTU, pour lesquels le volume de suppléments parus au fil des années permet de pallier le problème).
Tout d’abord, avec Blue Planet, un jeu lui aussi ouvert, mais dont le contexte est de moindre ampleur que celui de Tigres Volants, puisqu’il ne contient en théorie que deux systèmes stellaires et le trou de ver qui les relie ; et qu’en pratique, 99 % des utilisateurs vont se concentrer sur la planète Poséidon, comme l’ont fait tous les suppléments parus, ce qui permet d’avoir un « point commun » entre ces suppléments et les attentes des utilisateurs.
La deuxième comparaison que je voulais faire m’a paru nettement moins pertinente quand j’ai commencé à y réfléchir, puisqu’il s’agit d’un JdR sans suppléments : MEGA. Là, l’ampleur des possibilités dépasse celle proposée par Tigres Volants, mais les PJ font tous partie de la même organisation (la Guilde des MEssagers GAlactiques), et on peut raisonnablement postuler que, si suivi de la gamme il y avait eu, les suppléments auraient eux aussi eu ce « point commun » qui fait défaut à Tigres Volants.

Alors, est ce à dire que proposer un JdR vraiment ouvert est une mauvaise idée ?
Je ne le pense pas ; et en tous cas, je préfère un contexte de jeu ouvert à un contexte bridant (ou bridé, partiellement exploitable / exploité). Mais si l’on raisonne en termes de gamme et de marché, alors ça peut effectivement se révéler un handicap.
D’où l’intérêt des gros bouquins ou boîtes de base bien complets (genre Warhammer première édition), comme on n’en fait hélas plus guère ; mais c’est un surcoût qui n’est pas forcément acceptable pour un éditeur, surtout si c’est pour ne pas avoir de gamme viable par la suite.

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5 réponses à Innocence lost, in this holocaust, as the last King Tiger rolls on

  1. Alias dit :

    Merci pour cette analyse.

    Pour ma part, je pense qu’une des erreurs a été de trop se concentrer sur Copacabana: deux suppléments, en plus de ce qu’il y a sur le livre de base, c’est clairement trop.

    Après, c’est vrai qu’il y a une question de ressources en temps et en idées, qui n’ont pas vraiment été à la hauteur de ce qu’elles auraient pu être.

    • Imaginos dit :

      > Pour ma part, je pense qu’une des erreurs a été de trop se concentrer sur Copacabana: deux suppléments, en plus de ce qu’il y a sur le livre de base, c’est clairement trop.
      Ça m’a d’ailleurs frappé quand je me suis lu la gamme, et je l’avais même fait remarquer dans mes kros.
      Devoir attendre le troisième supplément pour quitter, non seulement Copacabana, mais même la Terre, dans une gamme de space opera, c’est un peu perturbant. Surtout qu’à mon avis, le bouquin de base avait déjà beaucoup décrit la planète, et que donc il n’y avait pas de besoin urgent d’en rajouter sur le sujet.
      C’est un point à retenir je pense pour le moment où tu te pencheras sur le suivi de la prochaine édition ! ;-)

  2. edomaur dit :

    … et puisque je passe par ici, tu aurais aimé quoi comme suppléments pour Tigres Volants ? (je suis curieux)

    • Imaginos dit :

      C’est un peu une question piège, car elle sous-entend que j’aurais des attentes précises, ce qui n’est pas le cas.
      Mais, outre le fait que les premiers suppléments de la gamme soient « non-terriens » (ou « non-terrestres » ?), comme mentionné précédemment :
      J’aurais bien été attiré par exemple par un supplément sur Alt, qui me semble avoir un gros potentiel en termes d’aventures.
      J’aurais bien vu aussi la description d’un petit coin d’espace (avec une douzaine de planètes ayant chacune droit à une bonne page) dans lequel les persos pourraient faire du cabotage avec un petit vaisseau, de l’espionnage ou du mercenariat, par exemple. L’un des problèmes du space opera est que l’ampleur du contexte est tellement vaste qu’on a souvent du mal à le ressentir « concrètement », d’où l’importance d’en détailler un bout qui pourra servir, selon leurs ambitions, de zone d’opérations ou de base arrière aux persos.
      Plutôt que Copacabana, j’aurais préféré qu’on s’attache à me décrire un lieu plus exotique pour un Terrien : Fantir, par exemple.
      Plutôt que la Dame de Fer, j’aurais préféré un supplément sur les Tigres Volants eux-mêmes.
      Et puis un truc sur les Karlans…

      Voilà.
      Maintenant, je le redis, je n’ai aucune attente précise : ne te base pas sur ce que je viens de dire pour prévoir de futurs suppléments, il vaut mieux prendre l’avis de gens qui font jouer à TV ! ;-)

      • edomaur dit :

        pas soucis :-)

        Le cabotage c’est une bonne idée, effectivement. Alt/Fantir/n’importe quelle planète, c’est plus difficile à valider, ça demande à chaque fois quelque chose de réellement intéressant à développer, et de suffisamment universel pour être publié (quand même.)
        Bref, j’ajoute quand même à la (longue) liste des suppléments TV3 qui ne seront selon toute vraisemblance jamais réalisés mais sait-on jamais…

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