La querelle des anciens et des modernes

J’ai déjà évoqué en ces lieux l’opposition entre ludosaures, pour qui l’âge d’or du JdR est révolu depuis des décennies, et jeunes turcs, qui le voient maintenant.
Je repensais récemment au problème, et je me disais que, sans rien connaître ou presque de la production actuelle, j’avais l’impression que de plus en plus, on publiait des JdR destinés à n’avoir aucun suivi (ou un suivi très réduit) ; alors qu’au contraire, à ce que j’appelle personnellement la Belle Époque, on cherchait plus à pousser les gammes aussi longtemps qu’elles étaient à peu près rentables.
Évidemment, les choses ne sont pas aussi simples que ça, notamment parce que le marché du JdR est beaucoup moins porteur à l’heure actuelle, ce qui rend extrêmement difficile de parvenir à éditer une gamme rentable (sorti de quelques grosses productions) ; voire une gamme tout court. Mais ça me fait quand même relativiser l’affirmation des jeunes turcs selon laquelle le choix n’a jamais été aussi vaste qu’aujourd’hui, affirmation qui jusqu’à présent me paraissait quand même relativement exacte : car il me semble qu’on compare là une époque révolue avec un nombre de jeux disponibles sur le marché relativement réduit, mais des gammes riches, donc une pléthore de suppléments, à une époque actuelle avec des jeux à la pelle, mais quasiment rien pour les alimenter derrière.
Bref, j’ai un peu le sentiment qu’on est entrés dans l’ère du JdR jetable, alors qu’auparavant, on essorait un bouquin de base jusqu’à en extraire la dernière goutte. Un jeu se vendant généralement mieux et plus cher qu’un supplément, c’est sans doute plus intéressant pour les finances des éditeurs (ou du moins, pour le trou dans leurs finances, car l’édition de JdR se fait sans doute en grande partie à perte) ; mais on peut attendre longtemps avant de voir se développer de nouveaux univers rôludiques aussi riches et fouillés que l’OTU ou Glorantha ; longtemps avant que ne sorte un nouveau JdR qui pourra prétendre par sa longévité jouer dans la même cour que Traveller ou RuneQuest (sans même parler d'(A)D&D)…
Alors il devient d’autant plus facile de comprendre pourquoi la plupart des ludosaures (dont je suis), juchés sur leur collection tels des dragons sur leur trésor amassé au fil des années, ne considèrent pas l’époque actuelle comme un âge d’or.

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2 réponses à La querelle des anciens et des modernes

  1. Regis dit :

    on est entrés dans l’ère du JdR jetable

    Je pense surtout que l’on est rentré dans l’ère du JdR apéritif; à savoir que les joueurs ne veulent plus avoir à se coltiner de longues règles, ni de longues descriptions d’univers fouillés et approfondis, ni de longues campagnes. Pourquoi? Peut-être parce que la plupart des rôlistes contemporains ne peuvent plus y consacrer ce temps, sollicités qu’ils sont par d’autres loisirs.

    Compare la situation actuelle à celle d’il y a 20 ans : 14 chaînes de télé gratuites de plus, Internet et son catalogue de films à la demande, des jeux vidéos (en ligne, multijoueurs) beaucoup plus prenants, les JCC, et les JdP qui ont fait leur révolution pour être eux aussi courts, sociaux, légers… apéritifs!

    métaphore
    Côté « offre des éditeurs rôlistes », la situation est comparable à celle d’un travailleur qui déjeune à l’extérieur, et dont le choix passe (il change de quartier par exemple) de 3 restaurants à un immense « mall » avec 60 boutiques de restauration et des formules buffets…

    Quand il n’y avait que 3 restos/jdr, il avait ses habitudes, son resto préféré, il discutait avec le patron et les habitués, connaissait la carte par coeur et commandait régulièrement son plat préféré.
    Avec le choix qui s’ouvre, il n’a plus simplement le choix de manger « chinois », mais japonais, coréen, thaï, indien, vietnamien… il veut tout essayer, picorer dans les buffets, il peut goûter le luxe de manger un plat principal différent chaque jour pendant plusieurs mois.

    Alors le consommateur va profiter de son choix jusqu’à l’indigestion, faire son tour d’horizon, puis va finir par tourner sur peut-être une dizaine de bouis-bouis en fonction de ses goûts et de ceux de ses collègues/partenaires (parce qu’il n’aime pas déjeuner/jouer seul) mais je ne pense pas qu’il limitera comme avant aux 3 restos dont il se contentait d’explorer la carte, alors que d’autres univers s’offrent à lui.

    Si tu ajoutes que dans son précédent poste, le rôliste/travailleur avait 2h pour manger, et que là il n’a plus que 45 minutes… tu retombes sur le JdR « apéritif » :)

    • Imaginos dit :

      Aussi, oui…
      Mais comme tes bouis-bouis n’ont qu’une existence limitée (la faute à la concurrence des autres bouis-bouis et à l’éparpillement des convives dans une multitude de bouis-bouis), ça n’en est pas moins également du jetable.

      (P.S. : je me suis permis de corriger la balise défectueuse dans ton commentaire)

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