La Planète Smade était l’unique satellite de l’étoile Smade, une banale naine blanche qui se situait dans une région relativement clairsemée de l’espace

On le sait, la gamme GURPS Traveller n’est pas pleinement compatible avec le canon travellerien, en raison d’une divergence importante par rapport à l’histoire de l’OTU, se produisant en 1116. Mais ceci mis à part, en principe les deux univers restent en grande partie compatibles.
Évidemment, il y a des points où les suppléments GT contredisent le canon de façon flagrante. En général, je mets ça sur le compte d’une méconnaissance de détails plus ou moins obscurs de la part des auteurs de la gamme GT. C’est ainsi qu’on peut en particulier relever plusieurs incompatibilités au fil des pages de Behind the Claw, qui serait sans cela un supplément vraiment excellent (et qui est un supplément vraiment excellent pour quiconque ne souhaite pas s’embarrasser d’une fidélité rigoureuse à l’OTU). Dans d’autres cas, ces incompatibilités peuvent provenir de tentatives pour rectifier certains détails posant problème, ou des contradictions du canon.
Mais en cherchant récemment quelques infos dans Rim of Fire, le supplément GT sur la Marche Solomanie, j’en ai découvert une qui m’avait échappée jusqu’à présent, et qui n’est pas une méconnaissance de la part de l’auteur GT, mais bien une volonté délibérée de changer un point. Délibérée, mais incompréhensible, et injustifiable.

Examinant la carte du sous-secteur de Gemini (O), j’ai remarqué que Smade’s Planet portait désormais le nom Demeter. J’ai tout d’abord cru qu’on avait remplacé sur la carte le nom du monde par celui de son étoile (que je ne connaissais pas, mais je ne prétend pas à une connaissance exhaustive du canon, même si je fais des efforts en ce sens…), mais pas du tout ! La Planète Smade (Marche Solomanie / Gemini 2433), unique monde indépendant du sous-secteur, qui tirait son nom du lieu où se déroule l’action au tout début du premier tome de La geste des princes-démons, a bel et bien disparu, supplantée par cette Déméter sortie d’on ne sait où (et membre de la Confédération Solomanie).
Mais qu’est ce que c’est que ce révisionnisme à deux balles !
J’ai fugitivement pensé que Jon Zeigler, l’auteur de Rim of Fire, avait voulu faire disparaître un emprunt trop flagrant à l’œuvre vancienne, mais un coup d’œil au sous-secteur voisin m’a montré que Krokinole n’avait pas été affectée…

Peut-être que certains conciliateurs essaieront de faire valoir le fait que la phrase « There are persistent rumors among the colonists regarding signs of previous human settlement, but so far nothing substantive has turned up » permet de faire coexister la version Classic et la version GT, mais ça me parait beaucoup trop tiré par les cheveux pour être ne serait ce que vaguement imaginable : entre 1108, année correspondant à la description de la Planète Smade dans le Supplement 10 pour Classic Traveller, et 1117, année où Déméter a été colonisée, que tout souvenir et toute trace de la famille Smade ait disparu, tant sur place que sur les mondes avoisinants, c’est tellement énorme que je ne peux même pas envisager de l’envisager.

On est donc là en présence d’une altération bien visible et purement gratuite du canon, qui par ailleurs n’apporte strictement rien par rapport à l’original. Une prise de liberté d’autant plus lamentable que, si sur des détails parus dans des publications mineures, on peut admettre que les auteurs de la gamme GT n’aient pas été au courant, la Planète Smade était bien décrite (et non simplement mentionnée) dans le Supplement 10 : The Solomani Rim, l’ouvrage de référence sur la Marche Solomanie auquel Zeigler n’a pu faire autrement que de se référer pour écrire Rim of Fire.
Et s’il voulait se faire plaisir en inventant un monde, il n’avait qu’à décrire l’un des nombreux mondes du secteur dont rien n’est dit dans le canon au delà de leurs caractéristiques. Chose qu’il ne s’était d’ailleurs pas privé de faire à de multiples reprises dans son ouvrage, et que je ne vois vraiment pas pourquoi il n’a pas fait une fois de plus, au lieu de se livrer à du révisionnisme.

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11 réponses à La Planète Smade était l’unique satellite de l’étoile Smade, une banale naine blanche qui se situait dans une région relativement clairsemée de l’espace

  1. Phersu dit :

    Jon Zeigler l’explique sur le Forum SJG :

    The original material had a number of Jack Vance « homages, » but when Rim of Fire was approaching publication, Steve Jackson decided that « Smade’s Planet » went too far for homage. I can see his point – borrowing not just the name, but the details of the story as well? Hence the retcon (with a vague reference to « earlier inhabitants » for people familiar with the original version).

    For another SF in-joke, check out the narrative entry for « Barsoom » in the same book.

    Je mentionnais l’autre jour que Space Opera avait aussi pris Arrakis tel quel dans son Atlas I, en gardant même le nom des Fremen. Les jeux de SF avaient une tendance à considérer toutes les propriétés intellectuelles de SF comme « ouvertes ». :)

    • Imaginos dit :

      J’ignorais cette explication.
      Mais ça ne me fait pas changer d’avis pour autant.
      Et pourquoi avoir éliminé la Planète Smade, tout en conservant à côté Krokinole qui vient de la même source, Barsoom ou Boskone ?

      Le seul argument que je considère comme recevable est celui d’Alain Ducharme s’étonnant de la présence d’une planète si peu peuplée et restée indépendante à un tel endroit. Mais il est possible d’inventer des explications, et c’est ce que j’aurais préféré que Zeigler fasse.
      J’imagine que l’intervention de Steve Jackson lui-même était peut-être liée à des négociations alors en cours pour les droits d’adaptation du cycle de Tschaï ? Mais enfin bon, s’ils s’étaient contentés de citer le monde sans le décrire, je ne pense pas que ça aurait fait plus de problèmes que pour Krokinole. Et ça n’aurait pas fait hurler les vieux inconditionnels du canon travellerien…

      Pour ma part, je m’en remettrai : je n’utilise de la gamme GT que ce qui est (à ma connaissance) strictement compatible avec le canon.

      EDIT :

      J’oubliais de réagir à ça :

      > Les jeux de SF avaient une tendance à considérer toutes les propriétés intellectuelles de SF comme “ouvertes”. :)

      Ce n’est pas spécifique aux jeux de SF : voir les hobbits et autres balrogs de D&D (et de T&T, qui lui a réussi à les conserver !), ou les chapitres du DDG sur les panthéons cthulhien, des Jeunes Royaumes, ou de Nehwon, pour lesquels je ne suis pas certain que des droits aient été versés…

  2. Alias dit :

    Pour ma part, je dirais que les premières versions de Tigres Volants avaient des emprunts, disons très visibles, à Space Opera.

    • Imaginos dit :

      Dans TV, je ne sais pas, ça ne m’a pas marqué dans la version 2 (mais je n’ai ptêt pas lu les règles avec suffisamment d’attention à l’époque), et je n’ai toujours pas pris le temps de lire la version 2dsf que j’ai pourtant acheté dès sa sortie (mais ça viendra…).
      Par contre, je me souviens que j’avais été frappé par le fait que certaines règles de la première édition d’Empire Galactique n’étaient ni plus ni moins que des repompages de Space Op’ (après, je serais bien en mal de dire lesquelles, ça date quand même de 25 ans environ…).
      Et puis j’y avais moi même fait divers emprunts pour la quatrième édition de mon propre jeu (mais j’avais le droit, je ne l’ai jamais publié). ;-)

      • Alias dit :

        À l’origine, les Siyani, les Rowaans et les Talvarids étaient directement inspirés de races de Space Opera – sans même parler des Highlanders, qui se sont longtemps appelés « Forerunners » (d’où Gabriel Fore).

        La plupart de ces scories ont disparu avant même la version 1.0b.

        • Imaginos dit :

          Ah purée, j’aurais JA-MAIS été chercher l’étymologie des Rowaans de ce côté-là, mais maintenant que tu le dis, ça dérive de Rauwoof, bien sûr !
          Les Talvarids viendraient des Blarads, ça se ressemble déjà moins au niveau des noms. Et les Siyani des Hissss’ist, alors ?
          J’aime bien ces petits aperçus sur l’histoire des JdR… :-)

          EDIT : orthographe défaillante… :-\

          • Alias dit :

            And now we know.

            Aujourd’hui, la création, c’est 10% création, 90% ne pas aller sur Internet; à l’époque, c’était 10% de création, 10% repompage, 80% de planquage de sources. Après suffisamment de planquage de sources, on arrive à quelque chose qui ressemble à une création originale.

          • Imaginos dit :

            Mais Une création originale, est ce que ça existe réellement ? ;-)

            Pour le reste, si personne ne peut crier au plagiat et si le résultat est bon, la plupart du temps je m’en fiche que ce soit plus ou moins fortement « inspiré de ».
            Et quand, comme dans le cas présent, on a droit à un aperçu des sources utilisées pour un truc qu’on croyait « original » (ou mieux encore, quand on les remarque soi-même), ça fait souvent l’effet d’un petit bonus.

      • Stéphane dit :

        EG était plutôt un quasi copier-coller de Traveller, non ? Construction de perso par mini-jeu des carrières, périodes de 4 ans, système de résolution de la 1ère édition à base d’un lancer de 2D. J’ai commandé le CD-ROM de Traveller 5 et j’ai constaté que Marc Miller était passé à un système quasiment similaire à la 2ème édition de EG (1 à 5D ou plus sous carac+compétence+/-bonus). Convergence étonnante…

        • Imaginos dit :

          > EG était plutôt un quasi copier-coller de Traveller, non ?

          Il y avait des inspirations plus que nette venant des deux jeux, Space Opera et Traveller.
          Mais celles venant de Space Opera m’avaient plus nettement marqué, sans doute parce que (dans mon souvenir, ça date quand même d’environ 25 ans et comme je n’ai plus utilisé ni l’un ni l’autre de ces deux systèmes de jeu depuis la fin des années ’80, j’aurais du mal à retrouver les points précis) c’était quasiment les mêmes mécanismes.

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